Page:Revue des Romans (1839).djvu/128

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LE GIAOUR, roman poétique. — Le Giaour est un tissu incohérent d’atrocités sombres et froides ; il est difficile de tuer en quarante pages plus de monde que lord Byron n’en immole dans ce poëme. Outre un combat qui coûte la vie à un grand nombre de soldats, l’Hélène de cette bataille est enfermée dans un sac et jetée vivante à la mer, et des deux rivaux, l’un, Hassan, tombe sous les coups de son rival, et l’autre, le Giaour, périt de désespoir, après avoir envoyé à la mère d’Hassan la tête de son fils. Quand on arrive à la fin de ce poëme, on croit sortir d’un rêve effrayant.

LE SIÉGE DE CORINTHE, roman poétique. — C’est encore un Turc, un renégat, qui est le héros du Siége de Corinthe. Obligé de fuir Venise où il est né, Alp s’est réfugié chez les musulmans, abjurant à la fois sa religion et sa patrie ; mais ce qu’il regrette le plus, c’est la belle Francesca, la fille de Minotti, celle à qui plus d’une fois il donna de mélodieuses sérénades dans l’heureux temps de sa jeunesse. Alp ne sait point si Francesca répond à ses feux ; mais il sait que depuis son exil on a vu Francesca plus rarement dans les bals, et plus souvent dans les églises, et lord Byron prétend que Alp en conçut beaucoup d’espoir pour ses amours. Cependant Minotti est allé s’enfermer avec sa fille dans les murs de Corinthe, que les Turcs assiégeaient. Alp, animé par l’amour et par la vengeance, se fait remarquer au milieu des Turcs, et, dans un dernier assaut, décide la victoire en leur faveur. Mais pendant qu’il cherche sa maîtresse au milieu du carnage et des décombres, il apprend qu’elle s’est donnée la mort ; en même temps une balle, partie d’une église voisine, vient frapper l’apostat. — il règne dans ce petit poëme un épouvantable fracas ; l’intrigue se noue par un coup de canon, et se dénoue par l’explosion d’un magasin à poudre. On y trouve des beautés de détails assez nombreuses, et le caractère d’Alp le renégat est tracé avec énergie.

BEPPO. — Beppo est un joli conte, qui finit d’une manière assez piquante. Beppo est un marchand de Venise, que les revers de fortune ont contraint d’abandonner sa patrie. Sa jeune épouse, la belle Laura, a paru d’abord inconsolable de son absence, mais, grâce au plus aimable des comtes italiens, elle s’est enfin consolée. Après quelques années, Beppo revient. Dans ses voyages, il s’est fait Turc, et, pour n’être pas reconnu à Venise, il ne change point de costume. Son turban et sa longue robe le déguisaient si bien à tous les yeux, que dans un grand bal, où Laura se trouvait avec le comte, elle ne le reconnut point, quoiqu’il ne cessât de la regarder et de la suivre. Lorsque le jour fut prêt à paraître, Laura et le comte se retirèrent. Mais quand leur gondole s’arrêta devant la maison de Laura, ils furent bien surpris de voir qu’en face d’eux était assis le Turc inévitable.