Page:Revue des Romans (1839).djvu/364

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qu’on puisse accuser l’auteur d’invraisemblance ou d’exagération. — Le grand mérite de ce livre est dans de beaux détails. Il abonde, surtout dans les premiers chapitres, en descriptions vives, en situations attachantes, et, au dénoûment, la scène entre Dauverney et le nain Hobibrah, sur le bord du gouffre, est pleine de mouvement dramatique et de véritable terreur.

LE DERNIER JOUR D’UN CONDAMNÉ, in-12, 1829. — Le Dernier jour d’un condamné est peut-être de tous les livres celui qu’on ne peut relire deux fois, mais dont on se souvient sans fin et sans cesse une fois qu’on l’a lu ; c’est l’histoire de la peine de mort racontée heure par heure, supplice par supplice, battement de cœur par battement de cœur, et racontée par l’homme qui va mourir. Affreux détails, mais que de vérités cruelles ! mais quel abominable sang-froid ! mais quelle patiente investigation des droits de l’homme considéré comme chair et comme sang ! comme chair qu’on ne peut toucher, comme sang qu’on ne peut répandre ! Dans son livre, M. Victor Hugo laisse de côté le crime pour ne voir que la peine de mort ; il n’attaque pas la loi, il n’accuse pas la loi, il attaque la peine de mort. Il calcule les lentes minutes de cette horrible agonie, avec une patience, avec un sang-froid atroce. Que ceux qui sont avides de détails sur les cabanons de Bicêtre et de la conciergerie, sur la cour d’assises, sur le romantisme de la geôle, des bagnes, de la place de Grève et des exécutions, se repaissent, s’ils en ont le courage, de ceux que M. Hugo a prodigués, souvent avec talent, et presque toujours avec une effrayante vérité, dans son livre ; quant à nous, nous regrettons sincèrement d’avoir cédé à la tentation de le lire. Un seul épisode mérite d’être loué sans restriction, c’est l’épisode de Pepita ; le tableau de cet amour si vrai et si pur, si ardent et si chaste à la fois, contraste douloureusement avec la condition désespérée du condamné, et on regrette que l’auteur n’ait puisé qu’une seule fois à cette source d’émotion.

NOTRE-DAME DE PARIS, nouv. édit., 2 vol. in-8, 1836. — Une nouvelle de Cervantes, intitulée La Bohémienne, a dû fournir la première idée de ce roman. Une jeune fille, enlevée, dans son enfance, par des Bohémiens, et retrouvée, au dénoûment, par sa mère, est l’héroïne des deux récits. Dans l’un et dans l’autre, cette jeune fille, malgré sa profession de danseuse des rues et la mauvaise compagnie où elle est forcée de vivre, a résisté aux séductions des hommes et de sa propre beauté. Mais là s’arrête la comparaison, et rien n’est plus dissemblable que la couleur des deux écrivains et les aventures des deux Bohémiennes. Celle de Cervantes est fille d’un noble corrégidor de Murcie ; celle de M. Hugo, née d’un père inconnu, a pour mère une malheureuse fille qui,