Page:Revue des Romans (1839).djvu/42

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forme l’esprit malin lui était-il apparu ? par quelles ruses diaboliques avait-il su l’engager à traiter avec lui ? c’est ce que l’on apprendra dans l’ouvrage de M. Auger, dont la lecture charmera ceux même qui ont lu le Petit Pierre, Eblis, et le Diable amoureux.

LE PRINCE DE MACHIAVEL, ou la Romagne en 1502, 2 vol. in-8, 1833. — Ce roman, écrit toujours avec élégance, parfois avec charme et entraînement, est une véritable histoire de l’époque qu’il retrace ; les Borgia s’y trouvent avec leurs crimes et leur débauches, l’Italie avec son beau ciel, le peuple avec sa crédulité, le soldat avec son obéissance, le citoyen avec son patriotisme ; la tyrannie de César Borgia y est en opposition avec les vertus de la république de San-Marino ; Machiavel, placé sur le second plan, y est tantôt acteur, tantôt spectateur ; tantôt c’est le Machiavel du Prince, tantôt c’est le Machiavel de Tite-Live et de l’Histoire de Florence. L’auteur mérite d’être loué pour tout ce qu’on trouve de conscience et de talent dans son livre, dont l’intérêt historique est si grand par l’époque qu’il embrasse et par la manière à la fois heureuse et savante dont il la développe. Rien ne plaît davantage que ce contraste moral de la petite république toute plébéienne de San-Marino et la puissance absolue d’un seul, surtout quand cette puissance est représentée par un Borgia. C’est aussi une idée excellente que d’avoir fait celui-ci moniteur de Machiavel, qui doit un jour l’offrir comme un type, soit aux peuples pour les effrayer, soit aux gouvernements pour les instruire ; car la question nous paraît indécise. On regrette toutefois que la haine de l’étranger ne perce pas plus dans les discours de l’envoyé florentin ; c’est dans son livre du Prince ce qui est de plus concluant en sa faveur. — Il y a certes plus qu’un romancier dans l’auteur de ce roman ; ce qui est beaucoup dire à une époque où les livres se fabriquent à la douzaine, où beaucoup de talent va se perdre, faute du temps nécessaire à leur perfection. Si la partie romanesque laisse quelque chose à désirer, au moins on ne peut reprocher à l’auteur l’abus des moyens violents et hideux, avec lesquels aujourd’hui on réchauffe trop souvent l’intérêt d’un ouvrage de ce genre.

LA FEMME DU MONDE ET LA FEMME ARTISTE, 2 vol. in-8, 1837. — Deux femmes sont en présence dans ce roman : l’une, la femme du monde, se plie aux exigences de la société ; l’autre, la femme artiste, n’obéit qu’à son imagination. La femme du monde dit : « Je suis pauvre, j’épouserai un riche vieillard, et je respecterai sinon la morale, du moins les convenances. » La femme artiste s’écrie : « Depuis mon enfance je suis préparée à des combats, à de bizarres événements ; je veux un état indépendant qui me per-