pays et d’abandonner son jeune enfant sans secours. Aussitôt que le bon capitaine apprend son malheur, il cherche à lui être utile ; sa fille manque de tout, il s’en charge, et cachant ses bienfaits sous un nom supposé, il la place chez un honnête bourgeois qui l’élève ; mais par suite de la fatalité qui poursuit les deux amis, cette malheureuse enfant est enlevée par un des neveux du capitaine, et déshonorée par l’autre.
HENRI, ou l’Amitié, trad. de l’allemand par Mme ***, auteur de un Hiver à Londres, 2 vol. in-12, 1811. — Trois caractères de femmes dominent dans ce roman ; toutes les trois sont d’une admirable beauté, toutes les trois sont extrêmement séduisantes, mais par des qualités bien différentes ; l’une, Amanda, l’héroïne du roman, par cette exaltation d’idée, de sentiments, de vertus, par ce vague de désirs purs et célestes, par ce langage mystique et poétique interprète de ses sentiments et de ses désirs, enfin, par cette conduite que les âmes froides appellent de la folie, par ces discours qui leur paraissent du galimatias, mais auxquels les âmes tendres donnent le beau nom de mélancolie ; la seconde, Rosalie, par une raison plus calme, plus éclairée, ornée des mêmes grâces, et capable des mêmes sacrifices ; la troisième, Henriette, par les charmes les plus piquants, par l’esprit le plus délié et le plus cultivé, par la coquetterie la plus adroite, les défauts les plus aimables, enfin par les vices les plus brillants. Amanda est mise en scène dès l’âge de douze ans et y figure très-bien. Née en Italie, formée par le malheur, élevée dans la solitude et développée par la mélancolie, elle offre déjà toutes les énigmes de conversation et de conduite naturelle aux personnes dominées par ce sentiment. Dès cet âge tendre, elle est conduite par un entraînement irrésistible, et sans savoir ce qu’elle fait, à aimer Henri Wilkens, à nourrir tristement et sans espoir ce sentiment au fond de son cœur. Cet amour, qui est réciproque, commence par une scène charmante de petite fille, de rossignol, de flûte et de téléscope. La mélancolie est peu du goût de la coquetterie, aussi la coquette Henriette se moque-t-elle un peu de la mélancolique Amanda. Avant de l’avoir lu dans Auguste Lafontaine, nous n’aurions pas cru que toutes les ruses, tous les piéges, tous les manéges de la coquetterie la plus raffinée fussent aussi à l’usage d’une Allemande ; et cela prouve ce que disait une Française qui avait beaucoup voyagé et très-bien observé : que si les hommes des diverses nations diffèrent beaucoup entre eux, les femmes diffèrent bien moins. Rien n’est plus séduisant que l’esprit d’Henriette ; elle sait s’accommoder parfaitement à l’humeur et aux goûts de ceux avec qui elle se trouve, tour à tour jouant tous les rôles, affectant toutes les vertus, ou s’élevant au-dessus de tous les préjugés. Prise dans ses pro-