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est la situation des lieux, des événements et des personnages imaginés par l’auteur, au moment où il va introduire l’illustre fugitif dans le château de Woodstock, autrement appelé la Loge Royale. Cette retraite, qu’il s’était figurée comme la plus sûre, la plus inaccessible, va devenir pour lui le piége le plus dangereux, et, suivant l’expression énergique de Cromwell, une véritable souricière, dont il paraît impossible qu’il échappe, autrement que pour tomber dans les mains de ses ennemis. Il échappera pourtant et à l’espionnage de Tomkins, et à la vigilance intéressée des commissaires, et au blocus des soldats, et aux recherches personnelles de Cromwell, qui ne dédaigne point de se transporter lui-même au château, pour ne point laisser à d’autres qu’à lui l’honneur d’une aussi importante capture. Charles échappera, et nous le verrons couronner, par un dénoûment heureux, le prodige de son évasion, et rentrer à Londres au milieu des acclamations de ses partisans.

Dans ce roman, Walter Scott s’est attaché à reproduire scrupuleusement, d’après les médailles et d’autres monuments contemporains, les traits et la physionomie des principaux personnages. Au premier rang figure Cromwell, dont le portrait se fait remarquer, même après ceux qu’en ont tracés Bossuet et Voltaire. Après Cromwell, c’est Charles II qui fixe l’attention du spectateur ; il arrive au château de sir Henri Lee, déguisé en femme, et son premier soin est de chercher à séduire une jeune fille qu’il rencontre auprès d’une fontaine ; introduit au château sous les habits de son sexe, il poursuit ses projets de séduction sur la noble fille de sir Henri, et finit par se battre avec le neveu de la maison, auquel elle est promise en mariage. Une circonstance habilement ménagée jette sur cette situation une couleur toute particulière : le frère de la belle Alice est ce même Albert Lee, qui seul dans la famille connaît le nom et la dignité de son hôte. Son dévouement à la personne du prince et à la cause royale n’est cependant pas altéré par les coupables intentions de Charles, et ses actes de courage au moment de l’attaque et de l’incendie du château par les troupes de Cromwell, paraissent au-dessus des forces d’un frère outragé dans ce qu’il a de plus cher ; c’est le fanatisme du royalisme, triomphant de l’épreuve la plus terrible qui pût lui être imposée. — Au milieu de ces scènes orageuses, Walter Scott trouve le secret d’en placer quelques-unes assez plaisantes, tirées des mœurs de l’époque. Rien n’est plus comique que les stratagèmes nocturnes employés par le docteur Rochecliffe pour effrayer les commissaires du parlement et les obliger de vider les lieux. On aime à voir ce scélérat de Tomkins, cet espion infidèle aux différents partis qu’il affecte de servir, tombé dans le piége