amour pour la poésie. Mais le siècle s’agite, le tonnerre gronde, la tempête éclate, et les flots montent peu à peu jusqu’au sommet où chante André Chénier ; ils saisissent le poëte, l’emportent au loin, et le jettent sur le rivage, meurtri, sanglant, tronqué par l’échafaud. On voit que sous les trois formes de gouvernement, absolu, constitutionnel et républicain, les trois poëtes sont assez maltraités. Le premier les craint, le second les dédaigne, le troisième les nivelle comme supériorités aristocratiques qui font du dédain rimé. — Dans ce livre, M. Alfred de Vigny a eu le tort de prendre un style pimpant qui est loin d’être celui dont il se servit pour écrire Cinq-Mars. Il règne dans son ouvrage un tel parfum d’aristocratie, un tel luxe de plaisanteries dédaigneuses pour les gens qui puent le peuple, qu’en vérité on serait tenté de trouver moins atroce, ou du moins bien provoquée, la vengeance que le peuple tira de tous ces persifleurs insolents et musqués, qui, jusqu’au jour où il fut le maître, avaient au si peu de souci de ses misères. Aujourd’hui, M. le comte a mauvaise grâce de rire au nez des gens qui dédaignent de se fâcher ; il y a même de sa part ingratitude, car il peut le faire sans danger.
Les poëtes feront-ils bien de suivre l’ordonnance du docteur noir ? Rabelais dirait peut-être ; Montaigne que sais-je ; Breloque ni oui ni non, ou qu’est-ce que cela me fait.
Nous connaissons encore de cet auteur : Servitudes et Grandeurs militaires, in-8, 1835.
LES EXILÉS, formant le tome IX des Œuvres de l’auteur, recueillies en 10 vol. in-12, 1702. — Le style de Mme de Villedieu est vif et léger, ses images sont animées ; elle a fait perdre, a dit Voltaire, le goût des longs romans ; mais, consacrée dès sa jeunesse à tous les plaisirs de l’amour, son style se ressent de ses mœurs : elle vécut et écrivit en femme galante. De tous ses romans, le meilleur est celui qui a pour titre : les Exilés ; rien n’est plus ingénieux que cet ouvrage, dont le but est de faire connaître les aventures de plusieurs grands hommes de l’ancienne Rome. L’auteur les rassemble tous dans une île où Ovide était exilé. Ovide, Lentulus, Hortensius, Cépion, sont les principaux personnages mis en action ; puis passant tout à coup à la cour d’Auguste, on y fait paraître d’autres acteurs, dont les actions ne sont pas moins intéressantes. Voici le jugement que Langlet du Fresnoy porte des autres ouvrages de Mme de Villedieu : « Les Désordres de l’amour, le Portrait des faiblesses humaines, Cléonice, ou le Roman galant, sont trois pièces assez bien écrites ; Carmente, roman bien écrit