Page:Revue des questions historiques, Tome X, 1871.djvu/6

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de ce qu’on a appelé « l’armée de la Loire. » Nous n’embrassons là, nous ne l’ignorons pas, qu’une partie de ce grand drame de la défense nationale qui s’est terminé si tristement à Versailles, au mois de février ; mais, n’est-ce point près de ce fleuve français par excellence que se sont débattues avec le plus d’efforts les destinées de la patrie ? N’est-ce point dans ces plaines fertiles de la Beauce que s’est gagnée notre seule victoire ? N’est-ce point là qu’un moment il a été permis de reprendre courage et de ne point désespérer du résultat final de la lutte ? Des malheurs inouïs, des fautes plus fatales encore, ont rendu inutiles les plus généreux sacrifices ; mais il est juste de répartir entre chacun la part de la responsabilité comme de l’héroïsme. La tâche est délicate : on ne saurait se flatter à l’avance de l’espoir d’échapper à tout reproche ; on peut du moins faire en sorte de ne s’entourer que de témoignages parfaitement véridiques, en se plaçant en dehors de toute récrimination politique et de tout esprit de parti.

Nous serons du reste singulièrement aidés dans notre travail par un certain nombre de publications locales qui donnent, à des points de vue divers, le récit des faits auxquels chacune des villes ou des bourgades de l’Orléanais a en quelque sorte participé. Ce sont autant d’esquisses spéciales, d’études détachées qu’il est nécessaire de grouper avec soin si l’on veut s’efforcer de composer un tableau d’ensemble. Parmi ces ouvrages, il en est un qui mérite spécialement d’attirer l’attention. Il a pour titre : Récits de l’invasion, Journal d’un bourgeois d’Orléans du 11 octobre 1870 au 10 mars 1871, et est l’œuvre d’un professeur distingué de l’Université, M. Auguste Boucher, auquel, comme à bien d’autres, la guerre avait fait de tristes loisirs. Ces loisirs, il les a employés à écrire jour par jour l’histoire des événements qui se passaient sous ses yeux. Puis, il a visité les lieux témoins des luttes héroïques de nos soldats ; il a recherché la vérité de la bouche des témoins eux-mêmes. Ses récits sont empreints d’une grâce poétique qui charme l’esprit, d’un ardent patriotisme qui enflamme le cœur. Peut-être chez lui l’impression du moment l’emporte-t-elle sur les conclusions générales. Mais, pour le détail, il est impossible de faire œuvre plus consciencieuse et plus attrayante ; et nous aurons souvent occasion de renvoyer le lecteur aux pages émues et délicates de M. Boucher. Toutes les autres publications qui ont paru