Page:Revue du Pays de Caux n1 mars 1902.djvu/24

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
18
REVUE DU PAYS DE CAUX

résultats boiteux. Tant qu’on ne se décidera pas à y porter la main (et ce sera une besogne audacieuse et ardue) rien de très complet ne devra être espéré.

Les socialistes et les radicaux ne pouvaient être satisfaits par des changements d’un ordre si anodin ; ils rêvent de bien autres bouleversements. Par exception, celui dont ils ont présenté la formule au cours des récentes discussions parlementaires n’était ni trop impratique ni trop intolérant. Ce qu’ils réclament, c’est une loi établissant : 1o  la continuité des trois enseignements ; 2o  la gratuité de l’enseignement secondaire ; 3o  la sélection obligatoire par des examens de passage et des épreuves éliminatoires. Il est bien certain que si, dans une démocratie, l’État se mêle d’enseigner, voilà à peu près l’idéal auquel il doit tendre. Bien plus heureuses sont peut-être les démocraties où l’État ne se mêle pas d’enseigner ; mais là n’est pas la question. Le plan socialiste comporterait la suppression des études primaires faites au lycée. Il n’y aurait plus d’études primaires que dans les écoles communales. Par suite, ne seraient admis au lycée que les élèves sortis de ces écoles avec les certificats suffisants. L’élimination se continuerait au cours des études secondaires ; les élèves qui ne satisferaient pas aux examens de passage se verraient contraints de quitter l’établissement. Enfin ne seraient admis aux études supérieures que ceux dont les études secondaires se seraient terminées par un examen final passé avec succès. Rigoureusement appliqué, sans défaillances et sans ingérences électorales, un tel système ne serait pas seulement juste et logique, il élèverait encore le niveau des études et formerait une belle élite intellectuelle.

Mais son corollaire indispensable, c’est la liberté d’enseignement. Avec elle, il produira tous ses fruits ; sans elle, il ne sera plus qu’une vulgaire et déprimante tyrannie, la main-mise spartiate de l’État sur l’enfant et sur l’adolescent, la folie de Lycurgue renouvelée et modernisée. Or, la liberté d’enseignement passe un mauvais quart d’heure. Le Sénat, que l’on croyait plus sage, lui en veut grandement et la Chambre que l’on croyait plus fière, emboîte le pas derrière le Sénat. On prépare à son intention toutes sortes de projets liberticides et nous verrons sans doute son père putatif, M. de Falloux, brûlé en effigie sur la place de la Concorde ; en effigie seulement, car il n’est plus de ce monde. À vrai dire, la loi