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JULES SIMON

JULES SIMON



Un dimanche de juillet on a inauguré sur la place de la Madeleine la statue de Jules Simon. C’est un monument très simple. Le socle de pierre qu’ornent deux bas-reliefs supporte un marbre qui ne vise pas à l’antique ; la silhouette est bien moderne : un homme de notre temps, debout, les bras croisés, avec le costume habituel et dans l’attitude journalière. La physionomie est à la fois douce et énergique ; il manque le regard et la voix et, chez Jules Simon, toute l’éloquence du caractère était là. N’importe ! telle quelle, cette statue satisfait les admirateurs et les fidèles amis du maître par sa simplicité d’abord et surtout par le site qu’elle occupe.

Ce site s’imposait certes. Au numéro 10 de la place de la Madeleine se dresse la maison dont l’illustre écrivain occupa, pendant les deux tiers de son existence, le dernier étage, et dont il gravit jusqu’à la fin l’escalier peu moderne. De là-haut, de ce balcon de fer qui court le long de la façade, Jules Simon, pendant plus d’un demi-siècle, observa les spectacles parisiens en même temps qu’il rêvait à sa lointaine Bretagne ; car ce Parisien était demeuré un Breton quand même et ce Breton était devenu un Parisien indéracinable. C’est là, qu’au milieu de ses chers livres, il traversa mille épreuves et surmonta mille obstacles tandis que sa plume infatigable soutenait à la fois son courage et son foyer.

Dès sa mort, l’emplacement fut choisi pour y commémorer sa mémoire et nul, au premier abord, n’eût prévu que la chose put être discutée. Elle souleva pourtant des difficultés qui parurent, un moment insurmontables. Le Conseil municipal de Paris en voulait rétrospectivement à Jules Simon de sa modération et de son libéralisme ; il fallut que les électeurs envoyassent siéger à l’Hôtel de Ville une majorité nationaliste pour que l’autorisation fut obtenue de remplacer par le monument d’un grand homme l’affreuse petite fontaine qui décorait le triangle formé à cet