Page:Revue du Pays de Caux n4 juillet 1903.djvu/5

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
125
CE QUI SE PASSE DANS LE MONDE

en vérité, de faire fi d’une telle puissance, de la traiter pour quantité négligeable, et de ne pas chercher à l’influencer à son profit…

Le rôle de l’Italie.

Ce ne sont pas les Italiens qui se conduiraient aussi sottement. Le plus humble d’entre eux a plus d’esprit politique dans son petit doigt que tel de nos députés dans toute sa personne. Nos voisins sentent parfaitement ce que la présence du Pape à Rome, apporte à tout le royaume de force matérielle et morale ; certes, cette même présence, avec l’organisation ecclésiastique et l’indépendance souveraine qu’elle comporte, n’est pas sans engendrer des difficultés quotidiennes auxquelles il n’est pas toujours aisé de trouver des solutions. Mais que sont ces ennuis, ces soucis secondaires auprès des avantages précis et immenses qui en découlent ? La grande situation que l’Italie moderne s’est acquise, est faite, pour une large part, de la sagesse du peuple, de l’habileté des gouvernants, de l’esprit de devoir des souverains ; mais elle est faite, pour une part plus large encore, de la protection efficace qui a été accordée au Saint-Siège et de l’entière liberté qu’on a su lui laisser. Il est naturel que le Pape, quel qu’il soit, continue de protester contre la spoliation dont il a été victime, mais il lui devient difficile de se prétendre prisonnier ; sa prison en effet est volontaire et l’expérience des trente dernières années prouve, qu’entouré d’un corps diplomatique de plus en plus important et orientant à son gré la politique de l’Église, il n’a pas perdu loin de là, la moindre parcelle de sa liberté. Le fait est patent. L’Italie a su s’organiser, s’affermir, se transformer en une grande nation unie, changer de politique et de gouvernement, ainsi qu’il convient à un régime constitutionnel et parlementaire, sans que le Vatican en ait éprouvé la moindre secousse ni la moindre gêne ; exception faite pour la nuit regrettable dans laquelle les restes de Pie ix, transportés à leur sépulture définitive de Saint-Laurent hors les murs, furent insultés par des bandes dont on connaissait et dont on aurait pu décourager les intentions, aucun incident de la rue n’a troublé la Rome ecclésiastique. C’est là un résultat très remarquable et il n’est que juste qu’il profite à l’Italie, comme il a profité au Saint-Siège.