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L’INDO-CHINE FRANÇAISE


Le pont du Fleuve-Rouge

Les travaux publics ont pris une extension considérable. Cinq réseaux de chemins de fer sont en construction qui, achevés en six ou sept ans, couvriront plus de 1970 kilomètres ; 90 kilomètres entre Haïphong et Hanoï sont en exploitation. En 1905, Hanoï sera en communication avec Lao-Kay la frontière chinoise, d’où la ligne continuera jusqu’à Yunnan-Sen. Une autre voie ferrée réunira Hanoî à Vinh. Tourane sera relié à Hué et à Quang-Tsé ; une ligne cochinchinoise ira de Mytho à Cantho ; enfin, 650 kilomètres de chemins de fer suivront les côtes de Saïgon à Langbiang. Mais, plus que les chemins de fer, que les travaux des ports de Tourane et de Saïgon, que les routes et les phares, les ponts métalliques ont frappé de stupeur nos sujets indigènes ; et par dessus tout, le colossal ouvrage d’art sur lequel le chemin de fer d’Haïphong à Hanoï passe le Fleuve Rouge, ce pont de 1680 mètres de long avec ses 19 travées et ses piles qui descendent à 30 mètres de profondeur au-dessous du niveau des basses-eaux. La puissance Française s’est révélée aux Annamites par la construction de cette merveille avec une force bien supérieure à celle que peuvent avoir les cuirassés et les canons ; ils se sont sentis en présence d’une civilisation supérieure ; le pont du Fleuve Rouge aura été un grand pacificateur.


Un dangereux triangle

L’Indo-Chine se trouve au centre d’un triangle qui pourrait lui être néfaste. L’Australie à droite, le Japon au sommet, l’Inde Anglaise à gauche sont les trois angles, d’où, en cas de querelle Anglo-Française, le danger viendrait. Nous avons commis une faute immense en ne nous ménageant pas l’alliance de la seule puissance Asiatique dont les ressources militaires et navales représentaient un appui de premier ordre : et certes, cela nous était facile. Il suffisait de ne pas nous associer à l’Allemagne et à la Russie pour empêcher le Japon de recueillir, il a cinq ans, le fruit de sa victoire. La Russie seule avait intérêt à soustraire la Corée à l’influence Japonaise. Il fut absurde de notre part de nous mettre le Japon à dos dans le seul but de faire plaisir à la Russie. L’Angleterre ne pouvait manquer d’en profiter : aujourd’hui le Japon est son allié.