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que les fils de fer bien enduits à l’huile ou plongés dans une dissolution basique se conservent sans altération.

Le pont suspendu le plus gigantesque que l’on connaisse jusqu’à présent a été exécuté dernièrement à Fribourg, en Suisse, par M. Chaley, ingénieur français. Ce pont, qui a 265 mètres de long, traverse d’un seul jet un vallon au fond duquel coule la Sarine, à plus de 50 mètres au-dessous du plancher du pont.

Aujourd’hui que la France a adopté ce genre de pont, et qu’il s’en élève sur tous les points, il ne serait peut-être pas inutile aux constructeurs de rassembler dans quelques feuilles les connaissances indispensables à leur construction, et surtout les méthodes abrégées qui peuvent servir à tracer les chaînes et les tiges, ainsi qu’à déterminer les dimensions des unes et des autres. Les figures 7, 8, 15, 16, 17, 18, 19, 20, indiquent différentes dispositions que l’on peut adopter pour les ponts extensibles.

Avant de passer à ce travail, nous allons jeter un coup d’œil rapide sur les ponts mixtes.

Art. 4. — Ponts mixtes. Les ponts mixtes, rigides compressibles, sont très-simples et fort anciens ; mais les autres espèces de ponts mixtes exigent des combinaisons assez savantes, et ne datent pas d’une époque très-reculée. Palladio en parle dans ses ouvrages. Il donne le dessin de plusieurs ponts en bois de ce genre qui peuvent être établis sans point d’appui intermédiaire sur des espaces de 100 à 110 pieds.

Un maître charpentier, nommé Martino de Bergame, a établi, sur un torrent appelé Cismone, au pied des Alpes, entre les villes de Trente et de Balsano, un pont de ce genre, dont la portée est de 102 pieds.

Les fameux ponts de bois de Schaffouse, de Wettingam, d’Églissaw, de la Kandel, construits par Grubermamn, Sladier, Ritter, etc., simples charpentiers suisses, sont établis d’après les principes des ponts mixtes. Ils se composent d’un système suspenseur principal compressible, auquel tiennent des moises extensibles en sapin qui supportent le plancher, et qui composent le système suspenseur accessoire.

Mais ces constructions si fameuses autrefois ne sont plus visitées aujourd’hui par les constructeurs dans le but d’en faire revivre de semblables. Les ponts extensibles en fer les remplacent avec trop d’avantages sous tous les rapports.

Ces ponts sont réservés pour les portées moyennes, ainsi que le pont représenté Fig. 11, qui porte le nom de l’ingénieur anglais Stevenson, qui, le premier, a présenté un projet de ce genre établi d’après les connaissances actuelles.

(La suite au prochain numéro.)

PRATIQUE.

NOTICE

SUR UN NOUVEAU SYSTÈME

DE CHARPENTE EN BOIS ET EN FER

Tout système de construction est tenu de satisfaire à la double condition de durée et d’économie, ou, en d’autres termes, tous les matériaux employés dans un système de construction doivent être placés dans des conditions de résistance telles, qu’on puisse leur donner les dimensions les plus faibles possibles, et que leurs assemblages soient de la plus grande simplicité.

C’est convaincu de ce principe, que j’ai composé le nouveau système de fermes de toitures que je vais décrire : pour le faire comprendre facilement, je commencerai par présenter l’exposé des considérations qui m’ont conduit à l’adopter.

Toute ferme en charpente est composée : 1o de deux arbalétriers ou pièces inclinées suivant la pente du toit, butant l’une contre l’autre par leurs sommets, et destinées à porter la couverture ; 2o d’un entrait qui réunit les parties inférieures des arbalétriers pour les empêcher de s’écarter, et qui détruit la poussée que, sans lui, ils exerceraient sur les murs qui les supportent. Viennent ensuite les autres pièces, que l’on peut regarder comme auxiliaires, et qui sont destinées soit à empêcher la flexion des arbalétriers sous la charge qu’ils supportent, soit à soutenir l’entrait, qui pourrait fléchir sous son propre poids.

La flexion de l’entrait est toujours facile à empêcher, car la force qui tend à la produire est faible ; mais il n’en est pas de même des arbalétriers, surtout lorsqu’ils ont une grande longueur, car leur équarrissage est très-limité, et ils supportent souvent des charges très-considérables. C’est donc sur les moyens à employer pour s’opposer à la flexion de ces pièces qu’il faut surtout porter son attention. On empêche facilement la flexion d’une pièce telle que AB (Pl. 2, Fig. 1) en plaçant sous son milieu une jambette CD qui s’appuie sur le tirant en fer ACB, arrêté en A et B par deux écrous. Il est évident, en effet, que le point D ne pourra fléchir sous une charge quelconque que par la rupture du tirant ACB ; donc, en donnant à ce tirant des dimensions proportionnelles aux charges qu’il supporte, on peut regarder ce point comme invariable. La jambette CD, qui joue alors le rôle d’un support fixe, réduit de moitié la portée de la pièce, qui ne peut plus fléchir qu’entre AD ou DB. Mais on peut très-facilement augmenter la rigidité entre ces points en augmentant la tension des tiges AC et CB, parce qu’alors cette tension faisant remonter le point D par la pression qu’éprouve la jambette, la pièce AB prend une courbure qui lui donne une grande force. Cette courbure est indiquée dans la figure par les lignes ponctuées.

On a ainsi un moyen très-simple de rendre rigide une pièce d’une grande longueur, et l’on conçoit facilement que deux poutres armées comme l’est AB seraient très-convenables pour former les arbalétriers d’une ferme en charpente ; aussi sont-ce deux pièces ainsi disposées que j’ai choisies pour composer les arbalétriers AB, AB (Fig. 2) du nouveau système que je propose. Je les ai réunis entre eux par un entrait CC en fer forgé, fixé aux extrémités des deux jambettes DC, D’C’. L’entrait a été attaché aux extrémités des jambettes pour plusieurs motifs : d’abord, parce qu’il est toujours avantageux de le placer le plus haut possible, afin de laisser plus de passage sous la ferme ; ensuite, parce que sa longueur est par-là réduite au tiers de l’ouverture totale entre les appuis ; et enfin, parce qu’ainsi placé, il fait agir forcément les armatures, comme nous le ferons voir plus loin. Il était d’ailleurs convenable d’attacher l’entrait à ces points, parce qu’ils permettent un assemblage très-simple sans entamer en aucune manière les arbalétriers.

Nous devons faire remarquer ici que, par suite du peu de longueur de l’entrait, nous avons pu supprimer le poinçon ; en-