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du soleil, qui les amollirait trop. En général, il faut éviter de faire des bitumages de terrasses sur des charpentes, parce que l’on a toujours à craindre les mouvements qu’elles produisent dans les alternatives d’humidité et de sécheresse.

On a fait ensuite des trottoirs. La compagnie de Seyssel est celle qui les exécute le mieux. Cette compagnie est la plus ancienne de toutes celles qui s’occupent de bitumages, et la première qui en ait fait des applications de quelque importance. Ses premiers travaux en terrasses et en trottoirs remontent à dix ou à douze années. Ils ont été exécutés d’abord à Lyon et ensuite à Paris, et ceux qu’elle fait faire maintenant sont fort bons, parce que les matières qu’elle emploie sont très-bonnes ; qu’elle a des procédés arrêtés et consacrés par l’expérience de plusieurs années, et des ouvriers expérimentés. Mais elle s’est bornée à la spécialité la plus facile, celle des trottoirs et des terrasses.

Les bitumes minéraux n’ont qu’un défaut, c’est d’être chers. Leur taux ne peut être diminué, parce qu’il résulte du prix des substances composantes, qui sont peu abondantes, et ne se trouvent que dans un petit nombre de localités.

On a bientôt reconnu les avantages des bitumages bien exécutés pour les trottoirs et pour les lieux que l’on voulait rendre imperméables. Aussi de nombreuses compagnies se sont-elles formées pour imiter les bitumages de la compagnie de Seyssel. La plupart ont échoué, faute de connaître les difficultés de ce nouvel art, qui en présente beaucoup.

On a cherché aussi à étendre les applications des bitumes aux bassins, aux toitures, et même aux chaussées des rues et des routes. Le bitumage des bassins et des pièces destinées à conserver les eaux présente beaucoup de difficultés, tant pour la liaison du bitume avec les maçonneries que pour empêcher les affaissements en été.

On ne peut pas employer le bitume en revêtement contre des surfaces verticales ou fort inclinées. Il faudrait que le bitume employé à ces usages fût très-dur ; mais alors il est trop fragile, il se gerce par la chaleur et se fend pendant les gelées.

Pour que le bitume appliqué à l’extérieur, sur des terrains exposés à la gelée et aux alternatives d’humidité et de sécheresse, puisse résister à ces actions, il faut qu’il soit flexible, et que cependant, il ait assez de cohésion et de ténacité pour ne pas trop s’amollir et pour ne pas couler pendant les grandes chaleurs. On ne peut éviter ce double danger que par les soins qu’on apporte dans la fabrication et dans l’emploi des bitumes. Chaque fabricant a ses procédés que l’on ne peut pas faire connaître.

Toitures Bitumées. — Les applications du bitume aux toitures ont été l’objet de nombreux essais. Les premiers ont manqué surtout par l’effet des mouvements des charpentes qui supportent les couvertures, et par le coulage en été, si difficile à prévenir sur les pentes.

Cette application n’a été poursuivie, à notre connaissance, que par une seule compagnie, celle des bitumes élastiques ; elle est parvenue à éviter, par deux moyens, les deux inconvénients que nous venons de signaler : Le premier consiste à interposer entre la charpente et le bitume un papier fort et résineux, qui, n’étant fixé sur les voliges que de distance en distance, peut, par sa flexibilité, céder sans déchirement et sans rupture aux mouvements des bois, lesquels sont peu sensibles entre les points d’adhérence. Le second moyen consiste dans le blanchiment du bitume. Ce procédé, éprouvé pendant plusieurs années, a le double avantage de donner au bitume de la fixité en le garantissant contre l’action du soleil, et de le préserver contre les autres actions atmosphériques, en sorte qu’il se conserve intact comme s’il était dans un vase clos.

Ces couvertures en feuilles de papier continues, parfaitement jointes et bien soudées ensemble par le bitume, présentant des surfaces unies sans aucun interstice, peuvent s’exécuter avec des pentes assez douces pour que l’on puisse marcher sur ces toits sans crainte, et s’y promener comme sur des terrasses.

Un modèle de ce genre de toiture fut déposé à l’Exposition des produits de l’Industrie de 1839, sous le n° 3305. Ce modèle avait été fait d’après un toit exécuté à Auteuil. On peut en prendre une idée en examinant le dessin ci-joint, qui représente une coupe en travers de ce toit. On y voit que la charpente ne se compose que de fortes planches de champ ; on les couvre de voliges étroites et jointives, dressées grossièrement.


AA, AA. Murs d’appui.

BBB. Cintres en madriers redoublés, pour remplacer les fermes.

CCCC. Pannettes en madriers de champ.

DDDD. Couverture en voliges, couverte de papier résineux, bitumée et blanchie.