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Page:Revue générale des sciences pures et appliquées, année 15, numéro 9, 1904.djvu/11

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LES EXERCICES PRATIQUES DE MATHEMATIQUES DANS L’ENSEIGNEMENT SECONDAIRE


conférence faite le 3 mars 1904 au musée pédagogique[1]


Messieurs et chers collègues,

C’est un exorde bien banal pour une conférence – puisqu’on a donné ce titre à nos modestes causeries – que de dire : Aucune compétence particulière ne me désignait pour traiter ce sujet ; beaucoup d’autres auraient été mieux qualifiés que moi pour le faire. Pourquoi donc vous en êtes-vous chargé ? telle est l’objection bien naturelle qui surgit chez l’auditeur. Je crois qu’il y a quelque intérêt à répondre à cette objection, non que j’aie le mauvais goût de vouloir vous entretenir de questions personnelles, mais parce que les raisons pour lesquelles il m’a semblé que le personnel enseignant de l’École Normale ne pouvait pas rester à l’écart de ces conférences et de ces discussions me paraissent être d’un intérêt général et toucher à des questions actuelles et vitales.

Le trait essentiel de la nouvelle organisation de l’École Normale et de l’agrégation est l’institution du stage scolaire. Dans des conditions dont le détail n’est pas encore réglé, nos élèves, sans interrompre complètement leurs études à l’École, seront mis, pendant quelques mois, sous la direction de maîtres éprouvés de l’enseignement secondaire[2].

Nous allons donc, Messieurs, dans un avenir prochain, collaborer à la formation des nouveaux agrégés ; n’est-il pas nécessaire que nous nous retrouvions de temps en temps pour causer de cette collaboration ; n’est-ce pas à cette condition seulement que l’organisation nouvelle pourra produire tous les bons résultats qu’on est en droit d’en attendre ?

Voilà pourquoi je n’ai pas cru pouvoir répondre par un refus à l’invitation qui m’était adressée par le directeur du Musée pédagogique ; on ne saurait trop multiplier les occasions de montrer quel intérêt on porte, à l’École Normale, à toutes les questions d’enseignement.

Cet intérêt a été contesté ; on a même prétendu, dans certains journaux, que la réforme récente avait pour but de rendre pédagogique une École qui avait cessé de l’être. Ce n’est pas devant vous qu’il est nécessaire de faire justice de ces accusations ; je voudrais cependant, puisqu’aussi bien la réforme de l’École est assez étroitement liée avec l’institution même de ces conférences pour qu’il ne soit pas déplacé d’en parler ici, en dire quelques mots. Je suis très heureux, en effet, d’avoir une occasion de chercher à dissiper quelques inquiétudes qui, je le sais, existent au sujet de cette réforme chez certains d’entre vous.

Bien entendu, je ne parlerai ici que de la Section des Sciences ; c’est à elle seule que se rapporte tout ce que je vais dire. Je penserai même plus spécialement aux Mathématiques, comme il est naturel. À quoi donc se réduisent, pour nous, les réformes dont on a fait tant de bruit, au point que certains ont feint d’y voir la disparition de l’École ?

Je n’ai pas à parler des modifications administratives dans la situation du personnel enseignant : que M. X… ait le titre de maître de conférence à l’École Normale Supérieure ou de chargé de cours à l’Université de Paris, délégué à l’École Normale Supérieure de l’Université de Paris, je pense que son enseignement et ses rapports avec ses élèves n’en seront nullement modifiés.

Quels sont donc les autres changements ? Pour ma part j’en vois deux, pas davantage, d’ailleurs liés l’un à l’autre : l’augmentation du nombre des élèves et l’externat prévu pour certains d’entre eux.

Le nombre des élèves que l’on recevra cette année à l’École n’est pas encore fixé ; d’après les termes du décret, on peut penser qu’il pourrait être voisin de 25 ; nous avons connu, il n’y a pas très longtemps, des promotions de 20 élèves (la Section des Lettres a eu des promotions de 25 élèves) ;

  1. Cette conférence faisait partie d’une série de conférences, suivies de discussions, sur l’enseignement des Sciences mathématiques et des Sciences physiques, organisées par M. Ch. V. Langlois, directeur du Musée pédagogique, sous le patronage de M. le Vice-Recteur de l’Académie de Paris. La discussion de cette conférence a eu lieu le 24 mars, sous la présidence de M. Jules Tannery ; dans cette discussion, certains professeurs de l’enseignement secondaire, tout en approuvant les réformes suggérées dans la conférence, ont exprimé la crainte que leur réalisation ne rencontrât des difficultés de la part de l’Administration, ou ne parût pas suffisamment conforme à la lettre des programmes. M. Jules Tannery a alors fait observer que, comme il avait été souvent répété dans les précédentes discussions, la lettre des programmes ne devait pas être regardée comme rigoureusement imposée à tous les professeurs, et que ceux-ci pouvaient librement les interpréter et notamment modifier l’ordre des matières. Ceci est, par exemple, nécessaire, comme l’a fait remarquer M. André Durand, si l’on veut faire faire aux élèves les constructions du premier Livre de la Géométrie avant d’avoir terminé le second.
  2. Rapport du Ministre de l’Instruction publique au Président de la République. Journal officiel du 10 novembre 1903.