Page:Revue maritime et coloniale, tome 18.djvu/535

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Les Jack-Jack, par leur industrie et leur intelligence, se sont élevés au-dessus de toutes les populations qui les entourent. Depuis près de deux siècles, ils sont en rapports suivis avec les Européens. Le port de Bristol compte deux maisons importantes dont les opérations sont concentrées sur ce point de la côte d’Afrique. La maison King possède pour ce commerce 16 navires, et la maison Lowders, 13. Un capitaine Powell, propriétaire de trois bâtiments, commence actuellement des opérations suivies. C’est donc une véritable flotte qui relie l’Angleterre aux Jack-Jack et qui, sur la côte, est représentée toujours par cinq bâtiments en moyenne. Leur séjour est plus ou moins long ; je pense qu’il faut moyennement six mois pour embarquer 200 tonneaux d’huile de palme. Le Fantee, de la maison King, vient d’en prendre 205 en moins de trois mois.

Chaque navire qui vient charger paye aux chefs un droit fixe de 8 onces (800 francs), et tout homme de l’équipage, chaque fois qu’il descend à terre, paye une once. A son arrivée, le capitaine se met en relation avec ses traitants ; les marchandises sont débarquées, transportées sur les marchés de la lagune et échangées contre de l’huile de palme. Cette huile est ensuite mise à bord par les Jack-Jack. Ainsi, le capitaine n’a affaire qu’à un ou deux traitants, gens riches et entendus qui lui offrent une sérieuse garantie pour les avances considérables qu’il leur fait. Il n’a plus qu’à attendre à son bord l’arrivée de son chargement. Le capitaine Edgell, du Fantee, vient de payer ses 205 tonneaux à raison de 11 francs le krou, ou les 30 litres.

On peut évaluer à plus de 5,000 le nombre de tonneaux d’huile qui, chaque année, s’embarquent chez les Jack-Jack. C’est une valeur moyenne de 5 millions de francs. Les marchandises d’achat représentent le tiers environ de ce prix, soit 1,600,000 francs. Le chiffre total des affaires, à l’importation et à l’exportation, serait donc de 6,600,000 francs.

Ce commerce considérable donne au pays une animation et une activité qui contrastent avec la tristesse et la solitude des environs. En arrivant à Grand-Jack et à Half-Jack, sur une plage plantée de nombreux cocotiers, on trouve le mouvement et la vie d’une place de commerce. Des hommes sont occupés à vider les barriques légères qui arrivent de la lagune et à remplir les pièces plus lourdes destinées aux bâtiments ; les autres les embarquent dans les pirogues et traversent les brisants. Une véritable flotte de pirogues, plus d’une centaine à chacun des deux villages, est disposée sur la plage. Il y en a de toutes les dimen-