Page:Revue maritime et coloniale, tome 18.djvu/538

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pendant toute l’année, il a toujours un bâtiment au moins à charger. Je lui demandai s’il était en rapport avec les habitants de la rivière Lahou ; il m’apprit que la guerre venait d’éclater de nouveau entre les villages d’Afé et de Pandan, et qu’il avait été obligé de rappeler quelques-uns de ses boys qui étaient allés traiter dans le pays.

Je quittai Guigré après être resté quatre heures chez lui ; il voulait, au moment de mon départ, me faire accepter un cadeau que je refusai.

Half-Jack. — En partant de Grand-Jack, je me dirigeai, en suivant le bord de la mer, sur le rivage de Half-Jack, distant de 6 kilomètres. Ce village présente les mêmes particularités que Grand-Jack ; il est dans la même situation sur la plage et ombragé également par de nombreux cocotiers. Les affaires y sont aussi actives, et deux navires anglais y faisaient leur chargement.

Le chef de Half-Jack, et l’un des plus riches traitants, se nomme Bony ; je l’ai vu l’année passée, lors de ma première visite dans le pays. Sans nous être ouvertement hostile, il ne passe pas pour nous être sympathique ; son accueil n’a jamais été très-cordial envers les officiers français. Un autre traitant, nommé Aby, les a toujours très-bien reçus dans sa case, dont les splendeurs n’approchent pas de celles de Guigré. Aby est un ancien esclave de Bony, qui s’est racheté et est arrivé par ses richesses à une grande influence. Une fois, Bony s’est montré très-jaloux et très-humilié de ce qu’un commandant du Grand-Bassam était descendu chez Aby, et il est venu le supplier de lui faire le même honneur. Aby est l’homme dont nous pourrions le mieux essayer de nous servir pour agir sur les Jack-Jack ; mais ses intérêts commerciaux sont les mêmes que ceux des autres chefs, et ses bonnes intentions pour les Français n’auraient, sans doute, pas assez de force pour lui faire abandonner volontairement des opérations où il trouve depuis longtemps de beaux profits, et en entreprendre avec nous de nouvelles dont il ignorerait l’issue. Cette situation ne peut changer que le jour où, sur les marchés de la rive Nord de la lagune, nos commerçants offriront les mêmes avantages qu’offrent les Jack-Jack.

Après m’être reposé chez Aby et m’être entretenu avec lui de l’état des affaires, je repris la route de la lagune. Le chemin, long de 4 ou 5 kilomètres, ressemble à celui que j’avais parcouru le matin, d’Alindja-Badou à Grand-Jack. On n’y rencontre, vers son milieu, qu’un seul marigot ; mais il est bien plus grand