Page:Revue maritime et coloniale, tome 18.djvu/558

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nouveaux traitants français reparurent dans la lagune, ils trouvèrent les chefs du pays de Dabou sous l’influence complète de leurs concurrents. Il ne pouvait en être autrement. Les naturels étant toujours assurés de trouver chez les Jack-Jack un assortiment de marchandises de toute sorte appropriées à leurs besoins. Nos factoreries de Dabou, au contraire, ne leur offraient, et seulement par intermittence, que des objets de qualité inférieure et souvent altérés. La seule monnaie du pays, la manille, leur manquait complètement. Des manilles fabriquées en France n’avaient pu entrer dans la circulation.

Ainsi les efforts du Gouvernement ont été presque inutiles. Un fort a été élevé à grands frais à Dabou ; une garnison y est entretenue. Mais pour tous ces sacrifices on devait espérer des résultats plus heureux.

Si, au lieu de récriminer contre les Jack-Jack, on s’était bravement mis en mesure de lutter avec eux et de les battre avec leurs propres armes ; si les factoreries avaient été approvisionnées avec intelligence ; si les marchandises avaient été de bonne qualité et en rapport avec les besoins des naturels ; si surtout les naturels avaient toujours trouvé le débit de leur huile de palme ; si les agents avaient été souvent plus actifs ; si le prix des marchandises n’avait pas été maintes fois exagéré, nous ne verrions pas aujourd’hui nos affaires commerciales moins prospères qu’elles ne l’étaient avant l’érection du fort de Dabou. Il est juste cependant de noter que la rigueur du climat, en privant plusieurs fois les factoreries de leur principal agent, a produit des temps d’arrêt désastreux.

Il suffit d’indiquer les causes du mal pour en découvrir le remède. C’est à nos négociants à l’appliquer. Nos tirailleurs, nos avisos n’y peuvent rien, et certes leur aide serait plus désastreuse qu’utile s’ils étaient employés à faire disparaître par la force une petite peuplade qui donne à tous les naturels le bon exemple du travail et du commerce. Qu’arriverait-il, en effet, si les Jack-Jack étaient balayés de cette langue de terre où viennent s’échanger chaque année des marchandises contre 4,000 à 5,000 tonneaux d'huile de palme ? D’abord la perte sur le marché général de la plus grande partie de ces 4,000 tonneaux ; puis une suite de guerres incessantes à soutenir contre les populations de la rive Nord soulevées par les Jack-Jack fugitifs, et que la terreur imprimée par leur destruction éloignerait encore de nous. Quand même nous serions en mesure de recueillir ce riche héritage commercial, nous trouverions les sources de production taries