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Page:Revue pédagogique, année 1897.djvu/656

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REVUE PÉDAGOGIQUE

les imperfections de l’enseignement indigène que de lui enlever peu à peu les ressources qui le font vivre.

Plus étonnantes encore sont les assertions qu’on trouve dans le même document parlementaire : « qu’il est peu probable que l’indigène se serve de l’instruction qu’on lui donne pour améliorer son état social ou celui des siens », que « sa seule pensée est d’en tirer parti pour obtenir une place dans l’administration et devenir fonctionnaire », qu’enfin « le résultat le plus certain des écoles indigènes est de créer, parmi les Kabyles, une nouvelle catégorie de déclassés ». M. le recteur d’Alger y avait répondu par avance[1] en dressant une statistique des professions exercées par les élèves sortis, pendant une période de cinq années, des principales écoles indigènes. À Alger, sur 137 élèves, on en trouvait 6 dans l’enseignement, 2 dans les médersas, 2 au lycée, 8 occupant des emplois au Crédit lyonnais, à la Compagnie du gaz, chez des notaires ou des avoués ; 119 suivaient la profession de leurs parents, exerçaient un métier manuel ou étaient entrés en apprentissage. À Constantine, sur 58 élèves, 37 exerçaient la profession de leurs parents ou des métiers similaires, 7 restaient dans leur famille, 5 occupaient des emplois divers, etc. À Oran, sur 133 élèves, 83 suivaient la profession paternelle ou des professions analogues. À Tlemcen, sur 140 élèves, le nombre de ceux qui s’étaient adonnés à la profession paternelle ou aux métiers manuels était de 109 ; à Mostaganem on en trouvait 126 sur 198. Cette statistique est particulièrement intéressante pour la Grande Kabylie. Sur 721 élèves, 54 étaient entrés dans l’enseignement, 10 étaient devenus militaires, 23 partis comme convoyeurs à Madagascer, 15 étaient décédés ou avaient quitté le pays, 1 était entré au lycée, 6 étaient devenus employés d’administrations diverses, 99 comptables ou commerçants ou élèves d’écoles d’apprentissage ou exerçant des professions manuelles, 513 étaient restés cultivateurs comme leur parents. On voit que si les écoles fournissent, comme il est naturel et nécessaire, des instituteurs, des employés d’administration ou de commerce, elles ne détournent pas des professions manuelles ou du travail agricole la très

  1. Rapport sur la situation de l’enseignement en Algérie pour l’année scolaire 1894-1895, Conseil supérieur de gouvernement, 1896, 1re annexe, p. 68 et suivantes.