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REVUE PÉDAGOGIQUE.

puis ils parlaient à eux. Il est bon qu’il le fasse trotter devant lui pour juger de son train, et juger jusques à quel point il se doit ravaller, pour s’accommoder à sa force. À faute de cette proportion nous gâtons tout. Et de la savoir choisir, et s’y conduire bien mesurément, c’est une des plus ardues besognes que je sache. Et c’est l’effet d’une haute âme et bien forte, savoir condescendre à ces allures puériles et les guider… Qu’il ne lui demande pas seulement compte des mots de sa leçon, mais du sens et de la substance ; et qu’il juge du profit qu’il aura fait, non par le témoignage de sa mémoire mais de sa vie. Que ce qu’il viendra d’apprendre, il le lui fasse mettre en cent visages, et accommoder à autant de divers sujets, pour voir s’il l’a encore bien pris et bien fait sien… C’est témoignage de crudité et indigestion que de regorger la viande comme on l’a avalée : l’estomac n’a pas fait son opération, s’il n’a fait changer la façon et la forme à ce qu’on lui avait donné à cuire… » Ce programme a été aussi fidèlement réalisé par les petites écoles de Port-Royal, quoique dans des conditions différentes, que par celles qu’ont inspirées ou dirigées Pestalozzi ou Frœbel.

C’était plus qu’une réforme, c’était une révolution entraînant des conséquences multiples. La langue maternelle doit dès lors remplacer le latin ; l’exemple en est donné, avec plus de succès que par Ramus, par Arnauld, Nicole, Lancelot, le P. Lamy de l’Oratoire, et suivi par Fleury et Rollin ; les Jésuites, comme Luther, conservent le latin : en revanche, ils inventent l’enseignement mutuel. Port-Royal invente la méthode de lecture qui porte son nom. Les mathématiques, l’histoire, la géographie, sont introduites à Port-Royal, à l’Oratoire, jusque dans l’Université de Paris, la plus lente à modifier les vieilles coutumes. Que si nous ntrions maintenant dans le détail des procédés, nous ver-