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Page:Revue pédagogique, premier semestre, 1887.djvu/477

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LA PRESSE ET LES LIVRES

» Le fait est que pour donner satisfaction aux plaintes qui se font entendre, dans ces cercles, sur les excès de nos programmes, il faudrait les alléger singulièrement. « Un peu lire et écrire. Mais à quoi bon pousser ce savoir au delà des éléments ? Qu’on sache lire le livre de cantiques et l’almanach, et enregistrer les rations de foin et de paille, n’est-ce pas suffisant ? » Que de fois il est arrivé que des patrons d’école ont demandé pour des instituteurs stagiaires la dispense de l’examen du brevet, non par pitié pour de pauvres diables qui sont manifestement incapables de le subir et qui se verraient privés d’emploi, mais par sympathie, par goût, parce que ce sont justement là les maîtres qu’ils préfèrent.

» Un autre jour, je dînais chez un noble, homme de cour, et tout à coup, par dessus la table brillante, il me jeta à brûle-pourpoint cette question : « Pourquoi, Monsieur le conseiller, faut-il maintenant que les enfants de nos villages apprennent la physique, la chimie et l’histoire des États de l’Europe ? »

» Cette question provoqua l’attention et une légère gaieté chez les convives. Je répondis à peu près :

» — La physique et la chimie, c’est-à-dire la connaissance de la nature ? C’est à cause du choléra. Quand les gens ne savent pas le premier mot des lois de la nature, ils perdent la tête et lapident les médecins. Nous devons protéger les médecins. » (À cette époque, les journaux étaient pleins du récit des événements qui venaient de se passer au milieu des populations profondément ignorantes et superstitieuses du midi de l’Italie.) « Et l’histoire des États européens ? Nous n’avons que l’histoire de la patrie sur le programme. Et il est nécessaire qu’on la connaisse, pour savoir tout ce que nous devons aux Hohenzollern, depuis qu’ils sont arrivés dans le Brandebourg. Il faut que les gens apprennent, » ajoutai-je en élevant la voix, « que c’est à la bonté de Dieu que nous devons la race royale des Hohenzollern ; s’ils l’ignoraient, ils ne voteraient pas comme ils doivent. »

» Il ne faut pas nous laisser intimider par ce genre de plaintes. Notre mot d’ordre doit être non pas : En arrière ! mais : En avant ! Il faut nous maintenir fermement sur le terrain de notre situation actuelle des séminaires et des écoles, pour y progresser. Déjà beaucoup de bien a été réalisé, ne serait-ce que les trois résultats suivants :

» 1. L’habileté incontestable à exposer oralement les connaissances acquises.

» 2. La certitude méthodique avec laquelle le maître formé dans nos séminaires aborde ses fonctions.

» 3. Le zèle actif qui le porte à pousser plus avant son instruction.

» Ce dernier résultat me paraît dû, par dessus tout, à l’institution de l’examen de titulaire d’école moyenne et de directeur, qui offre aux jeunes instituteurs un stimulant, un but plus élevé à leur activité et une plus large carrière. »