elle-même superficielle ; la conversation de l’enfant à la maison, dans la rue, dans la cour, aux champs, au pâturage exprime ses besoins profonds, se mêle à son activité personnelle et spontanée, à sa vie réelle. À l’école il a vaguement le sentiment de ne faire que jouer un rôle, et les acteurs s’abstiennent de parler à la ville le langage de leur personnage au théâtre. Il est inévitable que, dans cette lutte inégale, l’exemple du maître, le bon usage, dont il est le représentant et le défenseur, soit vaincu.
Les leçons de grammaire seront-elles donc pour lui d’un utile renfort ? Objection facile à faire et presque aussi facile à réfuter. Oui, nous croyons qu’elles lui fourniront une aide efficace. Car alors son action se transporte sur un autre terrain. Tant que deux usages sont aux prises, il ne s’agit que de formation d’habitudes et ce sont les influences les plus anciennes, les plus fréquentes, les plus profondes, les actes le plus souvent répétés qui l’emportent. Mais par la leçon de grammaire on fait appel à l’intelligence et à la réflexion. Dans ce domaine le maître est sans rival. Contre les mauvaises habitudes il se donne comme auxiliaires les facultés de raisonnement de l’enfant. Nous sommes trop portés, depuis quelques dizaines d’années, à les méconnaître. L’enfant généralise, induit, et surtout déduit à jet continu. Sans doute il se trompe souvent ; mais cette précieuse activité intellectuelle se manifeste lors même et par là même qu’elle s’égare. S’il est « raisonneur » et plus encore que nous ne supposons, car il a souvent la prudence de ne l’être qu’en dedans, c’est qu’en effet il raisonne. Il serait temps de réagir contre cette conception de l’enfance qui la réduit à l’instinct et au sentiment, à une sorte de pensée privée de logique. La vraie méthode de l’éducation est de mettre en jeu