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Page:Revue pédagogique, second semestre, 1880.djvu/206

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REVUE PÉDAGOGIQUE.

reproché à Rousseau, avec une sévérité qui nous semble excessive, d’avoir fait de Sophie, c’est-à-dire de la femme, non une personne existant pour soi, mais un objet aimable et créé pour plaire, dans une sorte de dépendance perpétuelle, Il nous paraît seulement que Rousseau n’a pas assez fait de la femme une personne véritablement morale ; nous bornons là notre critique : car, pour le surplus, notre pensée est que Sophie est bien véritablement une personne, ayant d’indépendance, d’action, d’empire même, ce qu’il lui en faut à son foyer et dans le cercle de sa vie quotidienne. Ce qui manque un peu à Sophie, c’est l’indépendance d’un esprit instruit et pénétré de la loi morale, principe de liberté et de dignité pour la personne. Elle a, par la forme de son éducation et dans la pensée de Rousseau, la clairvoyance d’analyse et d’observation qui fait, dans le ménage et dans la vie, la bonne politique et la bonne tenue ; mais dans les grands périls, dans les crises, saurait-elle où se prendre ?

Il ne faut pas cependant que des imperfections regrettables nous fassent perdre de vue ce qu’il y a de bon et de méritoire dans la pédagogie féminine de Rousseau. Voulant en marquer les faiblesses, nous avons dû écarter un moment l’image attrayante de la personne de Sophie : il ne faut qu’y revenir et l’évoquer telle que Rousseau Pa tracée, pour sentir vivement ce qu’il eut d’intentions excellentes et même d’inspirations heureuses dans les quelques. pages qu’il a consacrées à l’éducation des filles.