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Page:Revue pédagogique, second semestre, 1882.djvu/532

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REVUE PÉDAGOGIQUE

seignement secondaire et de celui que s’est fait le collège Sévigné. Les pays où l’éducation des filles est le plus en honneur n’en ont pas d’autre. Religion, morale, langue nationale et langues vivantes, littérature ancienne et littérature moderne, histoire, géographie, arithmétique, éléments de géométrie, sciences physiques et naturelles, économie domestique et droit usuel, dessin, musique, gymnastique : tel est l’ensemble des connaissances, plus ou moins développées suivant le degré de leur utilité, qui, chez tous les peuples dont nous sommes entourés, constituent le seul fond commun. La loi du 21 décembre 1880 n’a fait que l’adopter.

III

Nous arrivons à la troisième question que nous nous sommes proposé d’examiner ici, à celle qui touche à la direction même des études. Quel est l’objet propre de l’éducation des filles, et, pour répondre à leur destination naturelle, quels en doivent être la règle et l’esprit ?

C’est ici surtout peut-être qu’il convient de recueillir le témoignage des femmes elles-mêmes, c’est-à-dire des juges tout à la fois les plus autorisés et les plus intéressés.

La théorie de l’égalité absolue des sexes devant l’instruction n’est pas nouvelle.

Le moyen âge a été généralement peu équitable pour la femme. Dans les sermons comme dans les fabliaux, on ne lui reconnaît guère que des défauts, et on lui attribue les pires de tous, les défauts des faibles : l’esprit de ruse et de perfidie. C’est un être inférieur dont l’âme ne pèse pas dans la balance de Dieu le même poids que celle de l’homme[1]. Toute la littérature gauloise vit sur ce fonds. Au quatorzième siècle, un jurisconsulte italien, François de Barberino, soutenait qu’il n’est pas nécessaire

  1. C. Lenient, De la Satire en France au moyen âge, chap. v et xxii. — Dans un opuscule imprimé en 1641, mais inspiré de la même doctrine, Simon Gadie, docteur en théologie, établit que les femmes n’étant pas hommes, le Christ n’est pas mort pour elles, et que, conséquemment, elles ne peuvent être sauvées : « Mulieres scilicet non esse homines, Christum ergo pro iis non esse passum, nec eas salvari. » Il faut ajouter que, dans une deuxième partie du même livret, l’auteur se réfute lui-même victorieusement. — Voir E. Deschanel, le Mal et le Bien qu’on a dit des femmes. p. 73.