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Page:Revue pédagogique, second semestre, 1892.djvu/331

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LE TROISIÈME CENTENAIRE
DE JEAN KOMENSKY (COMENIUS)


« Petit pays, grand peuple, » a-t-on dit de la Suisse. On pourrait en dire autant de la Bohême. Elle a lutté et lutte encore vaillamment pour son indépendance ; elle a eu des hommes qui livrèrent de rudes combats aux sectaires, aux réactionnaires de leur temps, et qui rendirent les plus grands services à la science, au progrès, à la civilisation en général. Il suffit de rappeler les noms de Jean Huss et de Jean Ziska. Il en est d’autres, non moins méritants, tout aussi populaires dans leur pays, dont la renommée s’est également répandue au loin, mais qui sont moins connus chez nous, où l’étude sérieuse et la connaissance approfondie des questions slaves, hommes et choses, ne sont encore que le privilège de quelques rares savants. On dirait vraiment, à lire ce qui se débite là-dessus dans certains journaux, que le monde slave est au bout du monde ou qu’on ne veut le voir que par un seul bout de la lorgnette. Nous avons une Société asiatique, une Société pour l’avancement des études grecques, etc. Pourquoi n’en fonderait-on pas une pour l’encouragement des études slaves ? Je livre, en passant, mon idée pour ce qu’elle vaut, et je serais heureux qu’elle pût faire son chemin et grouper autour d’elle des hommes dégagés de tout préjugé, de tout esprit de parti, et animés du seul amour de la science.

Hé bien, parmi ces hommes éminents dont les Tchèques sont fiers à bon droit, et qui font honneur à l’humanité tout entière, brille au premier rang Jean-Amos Komensky, plus connu sous le nom latinisé de Comenius : grand penseur et pédagogue remarquable, il peut être considéré comme le père de l’enseignement primaire moderne, comme l’ancêtre des plus éminents pédagogues de notre époque.

La Bohême a célébré le 28 mars dernier le troisième centenaire de la naissance de Komensky. Ce fut une véritable fête de l’émancipation de la pensée ; aussi eut-elle un écho retentissant dans les pays où jadis l’influence de l’éducateur tchèque s’est exercée, en Hongrie, en Hollande, en Angleterre, même dans cette Allemagne