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FRANÇOIS BACON

MÉTAPHYSICIEN


I

Bacon et la méthode des sciences naturelles.

Il n’y a guère dans l’histoire de la philosophie de nom qui ait fait plus de bruit que celui de François Bacon. Pour l’auteur de l’Instauratio magna, la gloire est venue vite et a duré. Si les adversaires ne lui ont jamais manqué, le nombre de ses admirateurs a toujours été plus grand encore, de sorte que le murmure des jugements sévères était couvert par le concert des éloges. Il semble que depuis un temps un revirement d’opinion se soit produit : les louanges n’ont pas cessé, mais ce sont maintenant les critiques qui retentissent et prédominent ; on dirait que, contrairement aux lois ordinaires de la perspective historique, la figure de Bacon diminue à mesure qu’on la regarde de plus loin.

Veut-on n’écouter que les savants, et les plus illustres ? Quelle différence, par exemple, entre le langage de Laplace et celui de M. Claude Bernard, entre les paroles enthousiastes de d’Alembert et les reproches tantôt amers, tantôt méprisants de M. Justus de Liebig !C’est à se demander si ces esprits éminents apprécient la même doctrine et jugent le même génie. Aux yeux de d’Alembert, François Bacon est un grand homme « dont les ouvrages si justement estimés et plus estimés encore qu’ils ne sont connus, méritent encore plus notre lecture que nos éloges[1]. » Or, parmi ces ouvrages, le Nouvel organe des sciences est celui que d’Alembert place le plus haut. Tout autre est le sentiment de M. Claude Bernard. « Ceux, dit-il, qui ont

  1. Discours préliminaire de l’Encyclopédie, 2e  partie.