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ANALYSESschmid. — Die Darwinischen Theorien..

création. Mais il n’y continue pas avec moins d’acharnement son opposition contre toute téléologie. « La cosmologie dualiste ou téléologique (vitaliste) doit regarder la nature organique comme le produit volontaire d’un créateur travaillant suivant un plan. Chaque espèce de plantes ou d’animaux doit lui apparaître comme l’incarnation d’une pensée créatrice… La théorie évolutionniste, que nous devons à Darwin, aboutit nécessairement, au contraire, à une cosmologie moniste ou mécanique, c’est-à-dire uniquement fondée sur la causalité mécanique. » Et le livre se termine par cette déclaration énergique : « L’aptitude à entendre la théorie évolutionniste et la philosophie monistique qui en découle donne la mesure la meilleure du développement intellectuel d’un homme. Citons encore quelques affirmations caractéristiques de l’Anthropogénie. « Les organes rudimentaires démontrent clairement la vérité exclusive de l’explication que le monisme ou le mécanisme donnent des organismes. » Le Darwinisme établit victorieusement, selon Hæckel (même ouvrage), que « les organes des sens les plus sagement construits, les plus admirables dans leur complexité harmonieuse ont été produits en dehors de toute finalité. »

Strauss résume et confirme ces déclarations dans son dernier ouvrage. Oscar Schmidt n’a pas assez de sarcasmes ironiques à l’égard d’un anatomiste et d’un paléontologiste de la valeur de Richard Owen, uniquement parce qu’il ne renonce pas à toute téléologie.

Les monistes traitent dédaigneusement comme un reste de l’antique anthropomorphisme la cosmologie qui prétend faire usage aujourd’hui de la catégorie de la finalité. Mais ils oublient que la catégorie de la causalité est aussi une forme subjective de la pensée, par conséquent une conception authropomorphique. Schmidt nous renvoie sur ce sujet au deuxième volume du livre de Wigand, et à un essai du duc d’Argyll sur l’Anthropomorphisme dans la téléologie, 1875.

Les adversaires, d’ailleurs, du monisme mécanique ne sont pas moins nombreux et moins ardents que ses défenseurs. Citons seulement parmi les philosophes : Ulrici, Fichte, Froschhammer, Vischer, Hartmann ; et, parmi les naturalistes, Kœlliker, Baumgartner, Wigand, et surtout von Baër.

Les chapitres qui suivent sont consacrés à l’examen rapide des conséquences du Darwinisme en théologie et en morale.

Les matérialistes conséquents, comme Büchner, aboutissent à la négation absolue de la religion ; les autres, comme Strauss, Oscar Schmidt, Hæckel essaient de substituer à la religion le culte de l’univers, l’adoration de la nature. Certains darwiniens nous recommandent de nous résigner pieusement à ignorer Dieu (comme Albert Lange, Herbert Spencer). Enfin plusieurs métaphysiciens essaient de fondre ensemble Spinoza et Hegel, et de rajeunir leurs doctrines avec les idées de Darwin : ainsi Carneri et Hartmann. Il en est même qui espèrent satisfaire aux exigences du Darwinisme par une simple réforme de la reli-