Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, VI.djvu/641

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
631
analyses. — horwicz. — Moralische Briefe.


Sources morales. 1° Idée que l’enfant est une partie de la mère ;
2° Sentiment de l’identité d’essence ;
3° Amour du père, dont l’enfant est l’image.

Citons encore un mot piquant sur « ce que le monde appelle amour « platonique et qui n’est ni tout à fait amour, ni tout à fait platonique. » En général cependant, surtout en ce qui touche l’amour pour l’autre sexe, l’auteur tombe souvent dans un réalisme trop bourgeois que ne relève pas toujours l’élégance de l’expression ; puis, l’idée de la volonté libre, si nécessaire pour l’explication de ce sentiment, est absente. Un auteur contemporain[1] a dit avec raison que ce que nous aimons c’est avant tout l’amour même ou la capacité d’aimer : il y a dans ces paroles le germe d’une conception plus élevée et plus vraie de ce que M. Horwicz appelle un peu dédaigneusement « l’amour romanesque ».

Nous terminerons ici cette analyse trop succincte d’un ouvrage riche en observations de tout genre, nourri de faits et d’idées et qu’on ne lira pas sans fruit ni plaisir, même si l’on n’est pas converti aux vues théoriques de l’auteur. L’étude de la sensibilité, longtemps trop négligée par les philosophes, qui en laissaient le privilège aux romanciers et aux poètes, est récemment revenue en honneur : les amis de la science et de la morale doivent s’en féliciter également. Les littérateurs, obligés de plaire à un public avide de nouveautés, cherchent souvent le succès dans la peinture de sentiments bizarres, malsains, exceptionnels ; mais les philosophes ont par profession l’horreur du rare ; législateurs de la pensée, ils doivent se tenir dans la sphère des vérités les plus générales : de minimis non curat prætor. Et ce n’est pas en entretenant les hommes de petites choses qu’on leur donne le sens et le goût des grandes.

Théodore Reinach.


A. Horwicz : Moralische Briefe (Lettres morales). Magdeburg, Faber, 1878, petit in-12, iv-126 p.

Ce petit livre, publié l’année dernière dans le Journal de Magdebourg, n’est pas seulement écrit pour les gens du monde. Les bibliophiles peuvent se réjouir : il se recommande encore à eux par trois qualités bien rares, par la commodité du format, par la beauté du papier, par le luxe de l’exécution typographique.

Divisé en sept parties qui sont autant de tableaux de l’état intellectuel et moral de l’Allemagne, il mériterait des éloges à tous les égards si la pureté de l’intention et l’ardeur du patriotisme épuisaient tous les mérites d’un livre.

Le premier chapitre, intitulé Blue devils, nous paraît être un modèle d’analyse : l’auteur y établit fort bien qu’une « humeur nerveuse, irri-

  1. M. Fouillée, la Liberté et le Déterminisme.