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le protoplasma, et des actions d’une autre nature, désignées dans leur ensemble sous le nom de synthèse morphologique. C’est là que se placent les questions de la genèse cellulaire et de l’embryogénie générale.

On voit par le simple exposé de ce plan d’études que la matière n’est pas près de manquer aux savants qui s’occupent de physiologie générale. Il y a telle de ces parties, par exemple l’étude des fermentations, qui suffirait à défrayer tout un enseignement. Nous ne pouvons pas avoir la prétention de donner à ces différents chapitres de la physiologie générale les développements qu’ils comportent, même en nous bornant aux généralités. Il faudra consulter le livre de Cl. Bernard, si l’on veut se rendre compte du détail de l’œuvre, des faits acquis dès à présent, de ceux qui restent à connaître, et des clartés soudaines qui jaillissent de leur rapprochement. Nous n’avons montré que la solide charpente de l’édifice et en quelque sorte le squelette décharné de l’œuvre systématique de l’éminent physiologiste.

Arrivés au terme de notre tâche, il nous reste à en dégager l’enseignement et à juger, cette fois avec les ressources de la science, le débat relatif au problème de la vie, soulevé par les écoles vitaliste et mécaniciste. Ni la cornue des mécanicistes, ni l’âme des vitalistes ne peuvent expliquer la vie. Les deux théories se valent, et l’on pourrait hésiter entre elles s’il fallait décerner la palme à celle qui méconnaît le plus complètement les réalités vitales.

Le vitalisme est une doctrine téléologique, c’est-à-dire purement métaphysique. La cause directrice qu’elle imagine possède une dignité sans fonctions ; elle occupe une magistrature purement honoraire et nominale. C’est un principe éternellement paresseux, incapable de rien exécuter et dont le physiologiste ne peut incriminer la responsabilité ou saisir l’intervention effective dans aucun acte, principe aussi stérile en physiologie que l’était en astronomie le principe recteur sidéral qui avant le temps de Newton guidait les astres dans leur course régulière. M. Chauffard avait bien compris ce vice de la conception vitaliste. « Ce n’est pas tout, disait-il, de proclamer une cause ; il faut encore savoir l’unir aux phénomènes et trouver en elle la réalité des effets qu’elle engendre. » Voilà ce qu’il a essayé de faire en rajeunissant le vitalisme traditionnel. Pour transformer la cause directrice en principe d’action et l’incarner dans l’organisme, il a imaginé ces caractères de l’unité vitale et de la spontanéité vitale, qui seraient en quelque sorte les preuves de la présence réelle et de l’action efficace d’un principe directeur. La science ne peut accueillir ces hypothèses ; l’expérience les a démenties.