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straszewski. — herbart, sa vie et sa philosophie.

la suite de cette réforme psychologique, soutient Drobisch, que la théorie de l’entendement a revêtu chez Herbart un caractère complètement différent de celui qui lui avait été imprimé par Kant.

Nous ne sommes pas tout à fait d’accord sur ce point avec le professeur Drobisch. La genèse de la philosophie herbartienne, exposée dans la partie précédente de notre travail, nous apprend que ce n’est pas la réforme de la psychologie qui a occasionné celle de la théorie de l’entendement, mais que ce sont les nouveautés introduites dans cette dernière qui l’ont mené sous l’influence de la musique à une réforme de la psychologie ; la meilleure preuve, c’est qu’elle repose chez Herbart sur des bases métaphysiques. Quant à sa théorie de l’entendement, elle a acquis un caractère nouveau et original, dont le professeur Drobisch nous donne une appréciation aussi juste que favorable, grâce à l’analyse critique de l’idée du moi.

Cette critique et la nouvelle conception du moi qui en résulta engendrèrent d’abord l’idée du non-moi ou, pour nous servir des paroles de Drobisch, celle de la conception kantienne de l’être en soi, — réforme qu’il appuya sur l’idée de l’être posée, mais insuffisamment développée par Kant lui-même. Que l’Être ne puisse être envisagé comme une qualité augmentant le contenu d’une idée par un nouvel adjectif, c’est une thèse que Kant a exposée le premier dans sa critique de la preuve ontologique ; il n’a pas profité cependant de cette grande pensée-là, où son application aurait pu lui être d’un secours éminent^ c’est-à-dire pour la détermination de la chose en soi. Il en résulta une attitude équivoque ; d’un côté, la chose en soi n’a de raison d’être que dans notre pensée ; de l’autre, sans elle, comme sans quelque chose d’indépendant de notre esprit, le phénomène serait impossible. La faute principale de Kant, c’est de ne pas avoir insisté suffisamment sur la différence de ce qui n’est pas perceptible dans l’objet avec ce qui peut y être connu de nous. Il affirme que non-seulement nous ne pouvons pas savoir ce que sont les choses en elles-mêmes par rapport à leur qualité, mais qu’en général nous n’avons aucune preuve évidente de leur existence. Herbart s’efforce donc de compléter le maître. Il convient que la nature intrinsèque de l’Être est un mystère, et qu’elle l’est, pour la simple raison que l’idée de l’Être en soi exclut toute relation avec les autres êtres et par conséquent avec le sujet pensant. Le savoir dépend de la perception des rapports ; mais précisément l’être en soi est d’une nature complètement inaccessible pour notre esprit. N’oublions pas cependant que l’être des choses, ce n’est pas l’Être en lui-même, ce n’est point un adjectif augmentant le contenu d’une idée donnée ; c’est une simple position des