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analyses. — astié. Mélanges de Théologie.

ques donnèrent lieu au sein de l’Église unie à l’État au schisme d’où sortit la nouvelle Église. — Si la liberté doctrinale, à un degré quelconque, doit sembler difficile à obtenir dans une Église, c’est plutôt dans une Église fondée par le libre assentiment et ne reposant pas sur un passé traditionnel. Les qualités de décision et de précision nécessaires chez les fondateurs d’un nouvel établissement les rendent d ordinaire fort peu conciliants à l’endroit des opinions divergentes. Ceux qui ont sacrifié à des convictions sérieuses une situation acquise ne sont pas hommes généralement à se départir de leur manière de voir. Ils tiennent spécialement à en consigner l’expression, sous les formules les plus résolues, dans la confession de foi, ou déclaration de principes qu’ils vont placer à la base du groupement nouveau. Il n’en fut pas de même, paraît-il, à l’origine de l’Église libre vaudoise ; on se fit de mutuelles concessions, et M. Astié a pu affirmer sans crainte d’être contredit, dans une occasion solennelle, que « le drapeau qui a toujours flotté » sur cette congrégation est celui de « la liberté théologique sur la base de la profession religieuse. »

Pour comprendre la portée de tout ceci, il faut se souvenir que ni M. Astié ni l’Église, dont il vante le caractère franchement progressif, n’appartiennent à ce qu’on appelle le protestantisme libéral, bien connu par la hardiesse avec laquelle il a écarté du christianisme l’élément miraculeux ou « surnaturel », selon une expression usitée, aussi bien la divinité de Jésus-Christ, au sens métaphysique, que les miracles rapportés dans les textes sacrés. L’honorable et sympathique écrivain appartient à une tendance moyenne, qu’on appelle tantôt école du juste milieu, tantôt évangélique libérale, sorte d’orthodoxie conciliante, qui fraternise avec l’hétérodoxie sur bien des points. Cela donne une double valeur à des déclarations comme celle-ci : « Ce n’est là ni le Dieu de Jésus, ni celui de Moïse ; c’est tout au plus l’Allah de Mahomet, que cet être vengeur, vindicatif, qui aurait abandonné le reste de l’humanité aux terribles conséquences du péché pour épouser les rancunes de ces élus, fort réduits en nombre, savourant à l’avance avec délices les châtiments qui doivent tomber d’éternité en éternité sur les infortunés que le père de famille doit avoir créés à cette fin. Voilà les épouvantables sentiments qu’ont su puiser, dans la religion qui s’appelle la Bonne Nouvelle, des hommes qui se piquent de recevoir la sainte Écriture avec plus de respect que d’autres chrétiens. Nous sommes faibles, beaucoup trop faibles, infidèles, lorsque, cédant aune charité peu intelligente, nous négligeons de protester énergiquement contre cet esprit de haine et de jalousie entre les chrétiens, qui rappelle les plus sombres jours du moyen âge et de la barbarie chrétienne. » Comme je suis convaincu que M. Astié est incapable de nier soit que Jésus et les apôtres aient cru à l’éternité des peines ou à l’enfer, soit que l’apôtre Paul ait enseigné la prédestination, soit que Calvin ait été le promoteur résolu de l’horrible doctrine qu’il condamne en ces lignes, j’en conclus que l’honorable professeur de Lau-