Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, VIII.djvu/240

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
234
revue philosophique

pas prétendre qu’elle conduise par une nécessité logique à l’amoindrissement de l’élément spirituel en faveur de l’élément absolu de Dieu, puisque l’existence sensible et divisée est seulement introduite dans l’être de Dieu comme une apparence vaine, trompeuse et non comme une réalité naturelle. Au contraire, en tant que le monisme abstrait dérive de l’idéalisme subjectif, il met la spiritualité de Dieu nécessairement au premier plan ; mais, en tant qu’il est déduit d’une manière ontologique, il rend plus facile que tout autre système la conciliation de l’élément absolu et de l’élément spirituel de Dieu. Le monisme abstrait n’est pas d’un emploi impossible en religion parce qu’il amoindrit le concept de Dieu, mais parce qu’il amoindrit le concept de l’homme ; c’est uniquement la nécessité de reconnaître également la réalité de l’homme qui force la conscience religieuse aussi bien que la conscience philosophique à passer du monisme abstrait au monisme concret. Ce dernier seulement est le vrai panthéisme, car de même que le naturalisme supprime la réalité du Theos, de même le monisme abstrait supprime la réalité du Pan.

Le monisme concret permet, aussi bien que le monisme abstrait, de concilier les déterminations spirituel et absolu ; le véritable panthéisme tient donc le juste milieu entre le théisme et le naturalisme, mais jamais le théisme ne peut être désigné comme occupant le milieu entre le déisme et le panthéisme. Pfleiderer lui-même se place constamment au point de vue de ce monisme concret ou du vrai panthéisme, et c’est précisément pour cette raison que son protestantisme spéculatif doit être regardé comme un progrès au delà du théisme antérieur de la théologie chrétienne. En qualité de théologien, il hésite sans doute à se ranger ouvertement sous le drapeau du panthéisme, puisque l’appellation de panthéiste a suffi de tout temps pour faire accuser d’hérésie ; mais, quoi qu’il fasse, il n’échappera pas à cette accusation. Il dit lui-même dans une remarque : Les représentants du théisme regardent avec raison la reconnaissance de la personnalité de Dieu comme le caractère distinctif de leur point de vue ; ils sont toujours disposés à appeler panthéiste le schismatique qui sacrifie la personnalité à l’absolu ; qu’il adopte expressément le panthéisme ou qu’il ne l’adopte pas, peu importe. Mais, s’il est impossible au protestantisme spéculatif de se soustraire au reproche de panthéisme de la part des autres théologiens chrétiens, il se peut qu’il se réconcilie bientôt avec cette désignation, qui à tout égard convient le mieux au point de vue qu’il soutient.

La raison pour laquelle Pfleiderer tient à écarter la détermination de la personnalité de Dieu est dans l’opposition qui existe entre les concepts de la personnalité et de l’absolu, opposition que Bieder-