Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, VIII.djvu/250

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
244
revue philosophique

religieuse, mais qu’elle n’a jamais traitées d’une manière sérieuse et quelle ne peut pas traiter sérieusement aussi longtemps qu’elle veut se maintenir sur le terrain de la tradition théiste. D’après sa nature, comme au point de vue moral, le théisme ne peut être qu’une religion de la loi ; de même, au point de vue du salut, il ne peut être qu’une religion de délivrance extérieure, miraculeuse. Au contraire, le principe libérateur de l’immanence exigé par la conscience religieuse autonome est purement panthéiste et entraîne comme conséquence inévitable le panthéisme complet. Pfleiderer ne se rend pas clairement compte de ce fait, parce qu’il croit pouvoir donner encore à son point de vue, essentiellement panthéiste, le nom de théisme.

On peut faire les mêmes remarques à propos du principe de l’immanence comme principe de la révélation. D’après le théisme, la révélation ne peut être qu’une communication de Dieu transmise par des moyens physiques ou magiques à l’homme placé en face de lui ; elle ne peut jamais être une perception directe de la présence de Dieu dans notre propre esprit, une pareille présence ne se comprenant que là où Dieu est essentiellement immanent à l’esprit de l’homme. D’après le théisme, cette immanence a seulement lieu chez les personnes possédées de l’esprit divin ; mais, d’après le panthéisme, elle existe chez nous à l’état normal, sans que nous en ayons conscience. L’importance du principe de la révélation vient de ce qu’il n’est pas indifférent, pour l’efficacité du principe de la délivrance, de savoir comment ce dernier s’est manifesté à la conscience religieuse ; il faut que celle-ci se soit pénétrée directement de la certitude de l’identité de notre être avec Dieu ou de l’immanence, afin que cette conviction de l’identité puisse développer dans notre âme la force nécessaire pour agir comme principe de délivrance. Toute révélation extérieure peut seulement exister et faire naître indirectement la révélation intérieure ; elle ne peut pas remplacer cette dernière. Une connaissance abstraite de l’identité de l’être de l’homme avec Dieu, produite par la réflexion discursive ou par un raisonnement philosophique, a donc par elle-même aussi peu de valeur religieuse que la croyance en cette identité appuyée sur le témoignage de personnes dignes de foi ; l’une et l’autre ne peuvent acquérir qu’indirectement de l’importance au. point de vue religieux, en excitant la perception intuitive de cette vérité, laquelle est seule capable d’agir assez fortement sur le sentiment religieux pour l’élever.

Autant il est nécessaire de distinguer entre la révélation indirecte et directe, autant il est illogique d’établir une distinction entre la révélation générale et particulière ou entre la révélation ordinaire