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delbœuf. — le sommeil et les rêves

la bête, n’aurait pas d’autre origine. La religion, fille des ténèbres, la science, fille du jour : cette opposition de race ne suffirait-elle pas pour rendre compte de leurs conflits incessants, de leur antagonisme irréconciliable ?


II


L’importance qu’on a toujours accordée aux songes ferait croire qu’on a dû de bonne heure en aborder l’étude, et qu’on est aujourd’hui arrivé à certaines notions exactes et définitives sur leur caractère et sur leurs causes. Il n’en est rien. Dans l’antiquité, nous ne pourrions guère mentionner sur ce sujet que quelques pages magistrales laissées par Aristote ; et, pour ce qui est des temps modernes, M. Maudsley[1] a pu écrire tout récemment les lignes suivantes : « L’étude des rêves a été négligée, et cependant elle promettrait d’être féconde pour un observateur habile et compétent qui l’entreprendrait avec zèle et méthode ; pour les médecins surtout, elle serait vraisemblablement pleine d’enseignement. »

Quant à l’état actuel de la science du sommeil, je n’ai pas assez d’autorité pour l’apprécier. Je me contenterai de citer les paroles de M. Vierordt dont la compétence est incontestable : « Quant à donner une théorie physiologique du sommeil on ne peut, dit-il[2], y songer. Pourquoi cette nécessité générale d’un affaiblissement périodique ou d’une suspension partielle des activités physiques et psychiques ? quelles sont les conditions tant corporelles que psychiques et, sans doute, très nombreuses qui amènent le sommeil physiologique et, en retour, préparent pendant le sommeil insensiblement le réveil ? quelles sont enfin les formes déterminées sous lesquelles les fonctions du dormeur se montrent en quantité et en qualité ? voilà toutes questions auxquelles il est impossible de répondre. »

Ce n’est pas que, depuis quelque temps surtout, il n’ait paru beaucoup d’ouvrages sur le sommeil et les rêves. Sans parler des livres devenus classiques de M. Alfred Maury et d’Albert Lemoine, et me bornant aux deux dernières années, je signalerai un opuscule de M. Serge Serguèyeff[3] ; un travail de M. N. Grote, écrit en russe[4] ;

  1. The Pathology of Mind (1879), p. 49.
  2. Grundriss der Physiologie des Menschen, 5e  édit. Tübingen. 1877, p. 653.
  3. Le sommeil et le système nerveux, préparation à l’étude de la veille et du sommeil. Genève, 1877.
  4. Les rêves, comme objet d’analyse scientifique. Kiev, 1878.