trouvée, de croire à un rapport nécessaire entre cette cause et son effet. Ici, M. Huxley lui-même nous donne raison et déclare que l’argumentation de Hume n’est pas rigoureusement concluante : « De ce que nous sommes incapables de dire quelle cause a précédé ou quel effet suivra un événement, s’ensuit-il que nous soyons dispensés de supposer nécessairement que cet événement a eu une cause et qu’il aura un effet. Le savant qui découvre un nouveau phénomène peut ignorer complètement la cause de ce phénomène, mais il n’hésite pas à la chercher. Et si vous lui demandez pourquoi il le fait, il vous répondra probablement : Parce qu’il doit y avoir une cause ; — ce qui revient à dire que sa croyance à la causalité est une croyance nécessaire[1]. »
L’ignorance où nous sommes de la nature de la cause, tant que nous n’avons pas eu recours à l’expérience, ne supprime donc pas notre prévision rationnelle de l’existence d’une cause quelconque. Ici, le fait sur lequel Hume s’appuie est un fait certain : seulement il lui donne une conclusion qu’il ne comporte pas. Mais voici qu’il appelle à son aide un fait au moins contestable : il prétend que nous pouvons penser à un phénomène sans lui attribuer une relation causale avec un autre phénomène. « Comme toutes les idées distinctes peuvent être séparées l’une de l’autre, dit-il, et comme les idées de cause et d’effet sont évidemment distinctes, il nous sera facile de concevoir un effet sans cause. »
Il est évident d’abord que Hume fait un cercle vicieux : car, pour justifier la conclusion que l’on peut séparer l’idée de cause et l’idée d’effet, il suppose d’abord que toutes nos idées peuvent être conçues l’une sans l’autre ; et ce principe ne serait précisément établi que si Ton avait démontré au préalable la possibilité rationnelle d’admettre un effet sans penser à une cause, ou réciproquement.
Mais, en fait, est-il vrai que les hommes puissent admettre un commencement d’existence sans cause productrice, et soient disposés, par exemple, à rêver des étoiles où la loi de causalité n’est plus souveraine ? Dans une page intéressante, M. Huxley s’efforce d’accréditer l’opinion de Hume[2] et de montrer que la nécessité causale n’est pas universellement admise. Pour le vulgaire qui ne réfléchit pas, dit-il, les neuf dixièmes des faits journaliers n’éveillent pas l’idée d’un rapport de causalité ; bien plus, ajoute-t-il, le vulgaire nie pratiquement ce rapport, puisqu’il attribue ces faits au hasard. La réponse est facile ; d’abord il est bien évident que la loi de causalité n’est la loi que de la pensée qui réfléchit. De même que