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qui n’irait à rien moins, si son triomphe était général, qu’à une révolution complète des notions fondamentales de la mécanique.

Cette hypothèse dénie toute réalité objective à la notion de force, spécialement à celle de force agissant à distance ; le mouvement de la matière ne se modifierait qu’au contact, et cette modification se ferait par échange de force vive entre les particules ultimes de la matière, en sorte que, dans un corps quelconque, la force vive totale ne puisse varier que par emprunt ou cession aux corps environnants. On admet donc ici que la force vive se conserve toujours à l’état actuel. Seulement elle peut être apparente dans les phénomènes généraux de transport, ou bien se dissimuler dans les vibrations et rotations des molécules, où ses variations ne se révèlent dès lors que par les phénomènes d’ordre physique, chimique ou biologique.

L’origine de cette hypothèse se trouve dans la théorie mécanique de la chaleur, et il convient d’en noter les diverses étapes.

Si l’on étudie pratiquement l’ensemble des appareils mécaniques qui transmettent le mouvement d’une machine motrice à une machine outil, on peut évidemment le considérer comme un système de points matériels soumis à deux forces extérieures, la puissance motrice et la résistance à l’outil. Depuis la mise en marche jusqu’à l’arrêt, ou bien entre deux autres moments entre lesquels la variation de la force vive sera nulle, la somme des travaux de toutes les forces, y compris les forces intérieures, d’après le quatrième théorème général de la dynamique, doit être nulle. Le travail moteur (celui de la puissance) est positif ; celui de la résistance (effet utile) est négatif ; il en est de même de celui des forces intérieures (frottement, etc.), et cependant les changements subis par les diverses pièces de la transmission sont inappréciables ; elles sont revenues à leur position originaire ; ce travail devrait donc être nul, ou tout au moins négligeable.

On était donc conduit à voir là une véritable destruction de force vive, sans production de travail, lorsque les célèbres travaux de Joule établirent que cette force vive perdue correspondait à des échauffements, et que, d’autre part, un corps, par le refroidissement, peut restituer à l’état actuel l’intégralité de la force vive qu’il a absorbée en s’échauffant.

On sait, depuis le temps de Pythagore, que le son est dû à des vibrations des molécules des corps, vibrations que l’on peut constater expérimentalement ; l’analogie constatée depuis longtemps entre les phénomènes de propagation du son et ceux de la propagation de la chaleur par rayonnement, et les expériences de Joule