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ANALYSES ET COMPTES RENDUS


Th. Funck-Brentano. — Les sophistes grecs et les sophistes contemporains (Paris, Pion, 1879).

Les sophistes grecs dont il est question dans le livre de M. Funck-Brentano sont ceux que tout le monde connaît ; les sophistes contemporains sont Stuart Mill et Herbert Spencer.

On pourrait croire, sur cette simple donnée, qu’il s’agit d’une diatribe ou d’un pamphlet contre deux de nos plus illustres contemporains. On se tromperait. Le livre de M. Funck-Brentano est un livre sérieux. L’auteur a profondément étudié son sujet. Il montre, dans la première partie, qu’il est au courant des travaux publiés en Allemagne et en France sur l’histoire de la philosophie ; il cite volontiers les textes de Platon et d’Aristote ; il les interprète à sa manière, avec une originalité incontestable, bien qu’on puisse souvent contester ses interprétations, A plus forte raison connaît-il les modernes. La rigueur, la netteté d’esprit, la bonne foi de Stuart Mill lui inspirent une admiration qu’il exprime souvent. Il a eu « l’honneur de faire personnellement la connaissance de M. Herbert Spencer », et il tient à déclarer « qu’il n’y a personne, parmi nos contemporains, dont il admire autant le grand savoir, ainsi que l’aisance avec laquelle il manie les notions métaphysiques les plus abstraites et les plus difficiles. » — Seulement, après examen, il a cru découvrir une profonde analogie entre les procédés et les méthodes de ces deux philosophes et ceux des anciens sophistes ; c’est cette analogie qu’il s’est proposé de mettre en lumière.

Le premier titre de l’ouvrage annonce une étude sur les sophistes contemporains ; le second titre ne mentionne plus que les sophistes anglais. Si l’Angleterre a le privilège de la sophistique, est-ce parce que M. Funck-Brentano réserve à nos compatriotes une étude spéciale ? est-ce parce que le sujet a été défloré par le P. Gratry ? Tout compté, il est plus vraisemblable que M. Funck-Brentano ne fait à aucun des nôtres l’honneur de le prendre pour un sophiste ; tout au plus nous accorderait-il quelques « esprits faux » ou un groupe de « rêveurs systématiques ». N’est pas sophiste qui veut, suivant notre auteur. Le sophiste, d’après lui, n’est pas un esprit faux, et, s’il est systématique, il ne rêve pas : « Esprit simple et délié, capable de suivre les abstractions les plus hautes en même temps que les observations les plus