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Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, VIII.djvu/535

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ANALYSESb. de la fléchère. — Les révolutions du droit .

et dans la morale. Bornons-nous à noter dès à présent que l’auteur, tout en adhérant à une sorte de déterminisme téléologique, que le titre de son ouvrage : « les Révolutions du droit », ne laissait pas pressentir, admet dans une certaine mesure la liberté. Selon lui, déterminés quant à nos buts, nous sommes libres dans le choix des moyens. Cette liberté d’ailleurs ne saurait empêcher de s’accomplir le plan providentiel, vis-à-vis duquel elle ne possède qu’une espèce de droit de veto provisoire. « Notre liberté se borne à choisir entre deux alternatives : opposer des obstacles à ce qu’on appelle la volonté divine, en rendre la réalisation plus lente, plus laborieuse, et par conséquent plus douloureuse pour nous ; ou, pour parler avec un prophète, préparer les voies et aplanir les sentiers du Seigneur. Mais le plan providentiel s’accomplira certainement tôt ou tard, avec ou contre nous. »

Logique et métaphysique. — Nous avons dans la contradiction un critère de l’erreur ; mais il n’y a point de critère de la vérité, l’harmonie pouvant recouvrir des contradictions latentes. Cependant c’est pour nous une nécessité d’agir, et par conséquent de croire. Or nous pouvons choisir jusqu’à un certain point les idées auxquelles nous voulons donner créance. Et quelles idées convient-il de choisir ? Celles qui répondent le mieux à nos besoins, à notre intérêt bien entendu. Partant de là, l’auteur postule comme articles de foi, au nom de leur valeur pratique, la croyance à la liberté, qu’il essaye au surplus d’établir par des arguments singuliers, la croyance à la causalité, la croyance à Dieu comme cause universelle et première, enfin la foi dans l’unité de l’espèce humaine. — L’influence de Kant est ici visible ; mais le philosophe du devoir eût sans nul doute énergiquement désavoué cette logique fondée sur l’eudémonisme, cette raison pratique qui se conforme non à une loi moralement obligatoire, mais au besoin personnel, à l’intérêt de l’individu. Et puis, croire sciemment par intérêt, n’est-ce pas vouloir qu’une proposition soit vraie tout en affirmant que sa valeur est uniquement relative à notre avantage ? Donner et retenir ne vaut, dit un axiome que l’auteur connaît bien. — Au fond, la méthode qu’il propose sous le nom de méthode de la foi ne saurait fonder aucune certitude, et elle est si peu capable de fournir des principes solides qu’elle laisse toujours place, nous en avons l’aveu formel, « à des transformations fondamentales dans le système de nos conceptions ».

Morale. — C’est l’intérêt personnel qui, comme on devait s’y attendre, est donné pour base à la morale ; l’intérêt social n’est qu’un moyen relativement à l’intérêt de l’individu. M. B. de La Fléchère n’en admet pas moins, avec quelque embarras, ce semble, que l’individu peut être tenu de sacrifier sa vie à la société. Il allègue que celle-ci, en usant de ce droit, exécute un plan providentiel. Ce mélange d’utilitarisme et d’idées religieuses reparaît en maint endroit de l’ouvrage.

Par où commence la société ? Par le règne de la force. Puis le fort s’aperçoit qu’il est de son intérêt de ménager le faible, qui acquiert, de ce chef, un certain droit à être respecté. De plus, rendre service à au-