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Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, VIII.djvu/550

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« La manière de s’exprimer (Redeweise) de Descartes offre particulièrement ces deux caractères. 1o Quant à la forme, il choisit l’expression la plus simple et la plus rapprochée du langage ordinaire, et ainsi il met le langage de la science dans le rapport le plus étroit avec la langue commune. — 2o Quant au fond, ou au sens, son principe est de ne créer des mots nouveaux, ou de ne fixer le sens des autres que là où les idées nouvelles l’y contraignent. Par le premier procédé, le langage scientifique se rapproche de celui de la vie commune ; il abandonne la forme purement scolaire. Les expressions ordinaires sont employées sans qu’on s’en aperçoive et sans être expliquées, car il paraît superflu, même nuisible de vouloir expliquer ce qui est simple et est connu de soi-même.

« La simplification, qui en résulte, du style philosophique, a certainement un avantage pour l’intelligence et la science elle-même. Il est clair que la recherche s’applique dès lors aux problèmes d’un intérêt universellement humain, et qu’au lieu de se renfermer dans l’école elle veut servir à la vie générale. Mais, pour le côté technique de la philosophie, il en résulte de graves dangers. Les expressions vagues ou à plusieurs sens s’introduisent dans la philosophie. Avec elles se glissent des idées confuses, non contrôlées, du sens commun dans l’entendement. Précisément, dans les endroits décisifs où se fait sentir la nécessité d’une nouvelle manière de les concevoir, le manque de précision du langage produit la confusion de l’ancien et du nouveau et, par là, donne lieu à beaucoup de malentendus et même de contradictions. À ces termes indécis appartient par exemple le mot Cogitare. Il y a plus, toutes les idées psychologiques principales en souffrent. Les idées physiques elles-mêmes ne sont pas exemptes de ce défaut. Aussi Leibniz avait bien raison de blâmer ce manque de définition des termes ordinaires dans Descartes. Mais le défaut tient au caractère propre de sa philosophie de ne poursuivre l’analyse que jusqu’à un certain point et d’ajouter celui-ci comme immédiatement donné.

« Là où Descartes fixe lui-même le sens d’un mot, ou en crée un nouveau, on peut admettre avec certitude un progrès réel des idées. Ce qui donne à l’étude de sa terminologie un intérêt particulier, c’est que, toutes les fois qu’il change le sens d’un mot, ce changement indique un point important de son système, il y a plus, une certaine direction nouvelle imprimée au mouvement scientifique en général. »

L’auteur donne ensuite quelques exemples de la manière dont Descartes a innové dans la terminologie philosophique. Il cite plusieurs des termes dont il a changé ou fixé la signification dans les parties principales de sa philosophie, et, tout en faisant ressortir les mérites, il croit devoir signaler aussi les défauts.

« Ainsi, dans la théorie de la connaissance, les expressions claire et distincte (clare et distincte) prennent pour la première fois le caractère de termes philosophiques et sont séparés l’une de l’autre.

« L’opposition de l’analyse et de la synthèse comme méthode scienti-