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croire et celle de désirer, et leurs combinaisons ou réflexions sur elles-mêmes. Tout ce que la nature a de clair, c’est l’étendue ou la durée de ses êtres, et leur mouvement, sorte de synthèse originale de la durée et de l’étendue. C’est une tentative également vaine de ne voir dans l’étendue et la durée que de simples relations d’atomes, et, dans la croyance et le désir, que des rencontres répétées de sensations ; tandis qu’on peut, avec une certaine vraisemblance, espérer de résoudre l’atome, la substance mystérieuse, en termes d’espace et de temps (c’est le fond de l’explication mécanique de l’Univers), et d’expliquer la formation des sensations les plus élémentaires, ainsi que des instincts les plus simples, par des amas et des legs accumulés de jugements ou d’efforts primitifs (dits de volitions). Impossible d’ailleurs de ramener à l’unité la dualité de l’espace et du temps, de la croyance et du désir. Pour Maine de Biran, l’intelligence n’est qu’un cas de la volonté ; pour Wundt, et aussi pour Descartes, pour Spinoza, qui traitent les appétits et les passions comme autant d’idées, la volonté n’est qu’un cas de l’intelligence. Egale erreur ; mais la dernière a ceci pour elle d’être l’expression fausse de cette vérité, développée plus loin, que le désir a essentiellement la certitude pour objet. Encore ici, notons une similitude frappante. Le temps a pu être considéré, en cinématique, comme une quatrième dimension de l’espace ; il ne viendrait à l’idée de personne de regarder l’espace comme un simple auxiliaire du temps. Il y a une science de l’étendue pure, la géométrie. La chronométrie auprès d’elle ferait triste figure. De même, la croyance l’emporte grandement sur le désir en indépendance et richesse propres. La logique traite de la croyance presque pure ; le désir pur ou presque pur n’a ni peut avoir de science à son service exclusif. L’éthique, qui répond en cela à la mécanique, s’occupe du désir croyant, de la volonté. C’est toujours sous la forme d’une proposition (où l’intervention cachée du désir est insignifiante) que se présente à nous le rapport du moyen à la fin, de même que nous nous représentons sous la forme, d’une ligne, d’une certaine étendue, le mouvement d’un corps.


Il


Caractère quantitatif de la croyance et du désir seuls.

Enfin, — car il est temps d’entrer dans le cœur même de notre sujet, — la croyance et le désir sont, à notre avis, de même que l’espace et le temps, des quantités qui, servant de lien et de support