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analogie avec une expérience connue de Goltz sur les grenouilles. Quand on a enlevé les hémisphères cérébraux d’un de ces batraciens, il suffit de chatouiller légèrement la région de la nuque pour déterminer un énergique coassement.

Du côté de la sensibilité, on observe à cette troisième période, plus qu’aux précédentes, des troubles considérables. Presque toujours, c’est de l’anesthésie. De ce symptôme nous n’avons rien à dire de particulier. L’anesthésie est complète, telle qu’on a pu faire des opérations chirurgicales (Broca, Follin, etc.). L’ammoniaque, l’acide sulfureux, promenés sous les narines, ne provoquent aucune réaction. On peut traverser le bras avec des aiguilles sans que le somnambule manifeste d’étonnement ou de douleur. Lorsque le sommeil se dissipe et que la sensibilité revient, les mêmes piqûres, qui n’avaient pas été perçues, redeviennent douloureuses. Mon ami R…, par exemple, était insensible pendant le sommeil ; je lui piquai assez fortement la main avec une aiguille. Dès qu’il fut réveillé, son attention se porta sur cette piqûre, qu’il ne pouvait pas s’expliquer.

Cette anesthésie complète de la troisième période contraste avec l’anesthésie incomplète de la période hallucinatoire. Il est rare que les sujets qui ont des hallucinations soient tout à fait insensibles. Presque toujours ils souffrent des piqûres qu’on leur fait, et s’en plaignent. Cependant on peut chez eux provoquer de l’insensibilité en faisant des passes sur la région qu’on veut rendre insensible, en frottant légèrement avec la main, par exemple, le bras dont on désire produire l’anesthésie. Ce fait, qui aurait pu paraître merveilleux il y a quelques années, est devenu plus explicable grâce aux expériences de M. Burq et de M. Charcot sur la métallothérapie. Chez les sujets profondément hypnotisés, on peut quelquefois rappeler la sensibilité, mais l’expérience échoue souvent, et la règle générale est que l’insensibilité est totale.

Les symptômes de suggestion sont plus marqués à la période de stupeur qu’à la période hallucinatoire. Cela se comprend facilement, attendu que la suggestion n’est qu’une des formes de l’automatisme.

En résumé, tous ces phénomènes, catalepsie, contracture, anesthésie, s’accordent avec l’hypothèse, que, dans l’état de somnambulisme profond, la spontanéité cérébrale a disparu.

Au moment du réveil, les fonctions cérébrales ne reprennent pas immédiatement leur intégrité. Nous n’avons malheureusement que peu de données sur ce point intéressant et obscur. On peut établir une analogie entre le réveil du somnambulisme et le réveil du sommeil ordinaire. Certaines personnes réveillées brusquement ne re-