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périodiques. — Brain : A Journal of neurology.

degré, ceux qu’on désigne ordinairement sous le nom d’aphasie ; et c’est seulement cette partie de son travail que nous analyserons.

La condition de l’aphasique est à la fois positive et négative.

1o Condition négative. — A. L’aphasique ne parle pas. Cependant il peut dire quelques mots ou quelques phrases (voy. plus loin Condition positive).

B. L’aphasique n’écrit pas (agraphie), ce qui se comprend, vu qu’il ne peut propositionner même mentalement. Un malade qui ne parle pas, mais qui peut écrire, n’est pas un véritable aphasique. Au contraire, l’aphasique peut copier, écrire de la musique.

C. Dans la plupart des cas, le malade ne peut lire, non seulement à haute voix, mais même mentalement.

D. Son pouvoir de faire des pantomimes est altéré. Il faut distinguer la pantomime de la gesticulation. Lever les bras pour dire c plus haut ». c’est une pantomime qui diffère du geste de surprise qui nous fait lever les bras.

2o Condition positive. — A. Le malade comprend ce qu’on lui dit et qu’on lui lit, et il se rappelle ce qu’on lui a lu. C’est là un point important, car il prouve qu’il n’a pas perdu les mots, bien qu’il soit aphasique. C’est que les mots sont en double : le cerveau gauche correspond aux mots qui nous servent à parler, et le cerveau droit aux mots qui nous servent à comprendre. Nous reviendrons du reste sur ce point.

B. Les organes de l’articulation fonctionnent normalement ; le malade peut mouvoir la langue, manger, boire, avaler, etc.

C. Les organes vocaux sont sains ; le malade peut chanter.

D. Le langage émotionnel paraît conservé. Le patient sourit, pleure, fronce les sourcils, fait varier le ton de sa voix suivant qu’il est vexé ou réjoui, etc.

E. Enfin, le malade a conservé certaines expressions qui reviennent continuellement, et d’autres expressions qui ne reviennent que d’une façon accidentelle. M. Jackson leur a consacré tout un paragraphe, et nous les examinerons plus loin.

Quelle est la condition du malade en ce qui concerne les images symbolisées par les mots ?

« Les mots sont en eux-mêmes sans signification, ce ne sont que les symboles des choses ou des « images » des choses. On peut dire qu’ils ont « derrière eux » une signification. Une proposition symbolise un rapport particulier de quelques images. » Eh bien, l’aphasique a conservé les images symbolisées par les mots. Il indique un objet qu’il connaissait avant sa maladie quand nous en prononçons le nom ; il peut continuer de jouer aux cartes, aux dominos ; il reconnaît l’écriture, bien qu’il ne puisse lire les mots écrits ; il distingue la poésie de la prose, etc. S’il ne peut lire, ce n’est pas qu’il ait perdu la perception ou la reconnaissance des lettres, c’est qu’il a perdu le langage. « Les mots écrits ou imprimés cessent d’être les symboles des mots em-