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Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, XV.djvu/146

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rire d’une façon immodérée, sans motifs sérieux. Elles se comportent, dit Ch. Richet, comme les enfants que l’on fait rire aux éclats alors qu’ils ont encore sur la joue les larmes qu’ils viennent de répandre.

« Leur caractère change comme les vues d’un kaléidoscope, ce qui a pu faire dire avec raison par Sydenham, que ce qu’il y a de plus constant chez elles c’est leur inconstance. Hier, elles étaient enjouées, aimables et gracieuses ; aujourd’hui, elles sont de mauvaise humeur, susceptibles et irascibles, se fâchant de tout et de rien, maussades et boudeuses par caprice, mécontentes de leur sort ; rien ne les intéresse, elles s’ennuient de tout. Elles éprouvent une antipathie très grande contre une personne qu’hier elles aimaient et estimaient, ou au contraire témoignent une sympathie incompréhensible pour telle autre : aussi poursuivent-elles de leur haine certaines gens avec autant d’acharnement qu’elles avaient autrefois mis de persistance à les entourer d’affection…

« Parfois leur sensibilité est exaltée par les motifs les plus futiles, alors qu’elle est à peine touchée par les plus grandes émotions : elles restent presque indifférentes, impassibles, même à l’annonce d’un vrai malheur, et elles versent d’abondantes larmes, s’abandonnent au désespoir le plus profond pour une simple parole mal interprétée et transforment en offense la plus légère plaisanterie. Cette sorte d’ataxie morale s’observe encore pour leurs intérêts les plus chers : celle-ci a l’indifférence la plus complète pour l’inconduite de son mari ; celle-là reste froide devant le danger qui menace sa fortune. « Tour à tour douces et emportées, dit Moreau (de Tours), bienfaisantes et cruelles, impressionnables à l’excès, rarement maîtresses de leur premier mouvement, incapables de résister à des impulsions de la nature la plus opposée, présentant un défaut d’équilibre entre les facultés morales supérieures, la volonté, la conscience et les facultés inférieures, instincts, passions et désirs. »

« Cette extrême mobilité dans leur état d’esprit et de leurs dispositions affectives, cette instabilité de leur caractère, ce défaut de fixité, cette absence de stabilité dans leurs idées et leurs volitions, rendent compte de l’impossibilité où elles se trouvent de porter longtemps leur attention sur une lecture, une étude ou un travail quelconque.

« Tous ces changements se reproduisent avec la plus grande rapidité. Chez elles, les impulsions ne sont pas, comme chez les épileptiques, privées absolument du contrôle de l’intelligence ; mais elles sont vivement suivies de l’acte. C’est ce qui explique ces mouvements subits de colère et d’indignation, ces enthousiasmes irréflé-