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ANALYSES.morselli. Il magnetismo animale.

donner à cette question une solution unique et absolue. Suivons-le donc dans les distinctions qu’il établit. Au reste, cette question-là est en ce moment à l’ordre du jour.

Considérons d’abord les dangers relatifs à l’état physique des sujets. L’hypnotisme, dit l’auteur, peut être provoqué chez les sujets sains, et il est dans ce cas un état physiologique ; d’ailleurs il ressemble beaucoup au sommeil naturel ; et enfin il consiste en phénomènes de nature psychique (p. 395), la rigidité et la catalepsie ne frappent jamais les muscles respiratoires (erreur de fait). Donc, à part quelques phénomènes tout à fait secondaires, tels que nausée, mal à la tête, etc., l’hypnotisation des sujets sains ne saurait avoir aucune conséquence fâcheuse. Il n’en est pas de même pour les hystériques et pour les névropathes en général ; l’auteur compare ces derniers à un individu qui aurait un poumon détruit par la tuberculose, et auquel on voudrait faire respirer l’air raréfié des hautes montagnes. Cette heureuse comparaison ne nous convainc pas. Encore moins sommes-nous de son avis lorsqu’il dit que, dans les spectacles et exhibitions d’hypnotisme, les névropathes sont en minorité, car ils recherchent peu les émotions nouvelles (sic), et que, par conséquent, ces exhibitions sont parfaitement innocentes (p. 401).

Les dangers relatifs au droit et à la moralité publique sont, d’après l’auteur, moindres qu’on ne l’a dit. Tout d’abord, il est à remarquer que les attentats sur des sujets hypnotisés ne peuvent pas se commettre dans une représentation théâtrale, en face de milliers d’auditeurs ; et de fait, ils ont toujours eu lieu entre les quatre murs d’une chambre privée ; ils ont tous été commis jusqu’ici par des médecins américains ou anglais. Le crime hypnotique par suggestion, en admettant qu’il soit exécuté par des délinquants instruits, ne laisserait pas de doute dans l’esprit des juges, car il se révèle par des caractères objectifs, comme la rapidité de l’acte, l’absence de motifs raisonnables (inexactitudes de fait). L’auteur conclut en déclarant que l’interdiction de représentations d’hypnotisme ne peut empêcher la diffusion de la connaissance de ces phénomènes dans le grand public, car on les trouve aujourd’hui partout dans les revues, les romans, etc. La mesure prohibitive est un des mensonges conventionnels de notre société moderne ; on ferme la porte à des faits qui entrent par cent fenêtres ; on légitime les soupçons de ceux qui supposeront que les médecins d’aujourd’hui sont jaloux de leur art, comme au temps de Molière ; on donne à l’hypnotisme la saveur du fruit défendu ; on fait croire aux malades qu’on voudrait hypnotiser dans un but de traitement, que ces pratiques présentent quelque danger. Les représentations de Donato ont le caractère d’une conférence de vulgarisation scientifique ; elles ont appris aux personnes étrangères à la médecine que l’hypnotisme n’est pas un fait charlatanesque, mais physiologique ; et c’est ce qui a fait la fortune des expériences des savants, qui n’ont plus eu à lutter contre le scepticisme, vaincu par Donato. L’auteur plaide avec une grande animation cette thèse, par laquelle il se sépare, comme il l’avoue franchement, de presque tous ses collègues.