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nios. Par contre, les sensations de goût occasionnées par des excitations internes non adéquates, ne doivent pas précéder la naissance. Ces sensations, en effet, sont très rares, chez l’adulte, à l’état de rêve comme à l’état de veille, et elles exigent des réminiscences appropriées, qui font défaut au fœtus. — Les sensations olfactives, chez les mammifères comme chez les oiseaux, ne se produisent qu’après la naissance ou l’éclosion. La possibilité, pour le nerf olfactif, d’être impressionné par des excitations internes non adéquates, est tout à fait improbable. La faculté d’éprouver des sensations olfactives se montre chez le fœtus de huit mois (expériences de Kussmaul). Mais il ne doit pas se produire de telles sensations avant la naissance ; alors, les fosses nasales ne contiennent aucune trace d’air, et la condition fondamentale à l’olfaction, l’inspiration de corps gazeux, fait défaut. « Les fosses nasales sont, comme la cavité buccale, avant la naissance, remplies d’eau de l’amnios, en tant qu’elles aient une ouverture. » — Les oiseaux entendent et voient avant leur sortie de la coque. Les mammifères n’entendent et ne voient qu’après la naissance. L’excitabilité du nerf auditif et la faculté de percevoir le son, ou du moins de réagir aux excitations appropriées, existent pourtant chez le fœtus. Mais la caisse du tympan est remplie d’une masse résistante ou de tissu gélatineux, et plus tard d’un tissu conjonctif, et les ondes sonores ne peuvent pas se propager de l’oreille externe à l’oreille interne. Il est, en outre, expérimentalement prouvé que la tête ne sert pas au son de conducteur. — La sensibilité de la rétine à la lumière et l’ouverture des paupières existent chez l’embryon humain. Il peut se produire chez lui des pseudo-sensations lumineuses, des manifestations subjectives, à la suite de causes internes non adéquates. Mais elles doivent n’être qu’accidentelles, à cause du profond sommeil de l’être intra-utérin, et de l’imperfection du tractus optique qui contrarie probablement le transport de l’excitation rétinienne aux centres.

Si nous ajoutons que, de l’avis de M. Preyer, on ne peut dénier au fœtus à terme, en fait de sentiments communs, un sentiment de plaisir et de douleur, le sens musculaire, et aussi la faim, nous aurons fait tout le bilan de la psychologie utérine. Les résultats, il faut l’avouer, sont encore bien minces.

III

La psychologie du nouveau-né et du jeune enfant est relativement plus facile, et beaucoup plus avancée. M. Preyer lui a consacré un fort volume de 560 pages. Ce n’est pas, comme on nous l’avait dit, une pure et simple monographie, écrite par un physiologiste éminent,