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ANALYSES.j. soury. Les fonctions du cerveau.

sations cérébrales motrices, sensitives et sensorielles ; et il n’est certainement personne parmi les philosophes qui ne se soit rendu compte du haut intérêt que présentent tous les travaux relatifs à cette question, tant au point de vue de la biologie générale, pour notre science des fonctions nerveuses en général, qu’au point de vue propre de la psychologie. Aussi convient-il à tous égards de signaler ici l’opuscule dans lequel M. Jules Soury a réuni les leçons qu’il a faites l’année dernière à l’École pratique des Hautes Études sur les fonctions du cerveau et publiées d’abord dans l’Encéphale.

On sait que, si presque tous, sinon tous, les cliniciens admettent aujourd’hui que les fonctions du cerveau ont des sièges distincts dans la partie corticale de cet organe, les physiologistes ne s’accordent pas aussi bien entre eux pour considérer l’écorce du cerveau comme fonctionnellement hétérogène ; du moins, c’est parmi les physiologistes que se sont rencontrés les plus ardents adversaires de la théorie des localisations cérébrales. Parmi ces derniers on remarque au premier rang le professeur Fr. Goltz (de Strasbourg). C’est l’examen critique approfondi des doctrines que Goltz a établies sur un très grand nombre d’expériences que M. J. Soury s’est proposé de faire. Son exposition pénétrante, son étude exacte et attentive, et sa critique toujours bien informée des observations, des idées et des théories de Goltz constituent un excellent travail, qui sera consulté avec un profit réel par les physiologistes et par les psychologues.

M. Soury expose d’abord très sommairement les principaux (procédés opératoires dont Goltz s’est servi dans ses expériences, puis en quelques mots le but même de ces expériences. Après cette courte entrée en matière, il présente successivement les résultats des recherches de Goltz sur les fonctions motrices du cerveau, sur la sensibilité générale, sur les fonctions sensorielles (vue, ouïe, odorat et goût) et sur l’intelligence. Dans l’esprit de leur auteur, les résultats de toutes ces recherches, poursuivies durant près de dix ans, sont favorables à la théorie de l’homogénéité fonctionnelle de l’écorce grise cérébrale. En réalité, il en va tout autrement. Et l’idée fondamentale du travail de M. J. Soury, et qui revient presque à chaque page, c’est que Goltz, en croyant ruiner par ses expériences la doctrine des localisations, a au contraire contribué à la fortifier. « En général, écrit par exemple M. Soury, Goltz est toujours amené par les faits qu’il observe ou provoque expérimentalement à ces idées de localisation cérébrale qu’il repousse de toutes ses forces dès qu’elles lui apparaissent avec quelque netteté. Il n’a pas assez de railleries pour ceux qui considèrent le cerveau comme constitué par une mosaïque de petits cerveaux… Mais il finira par reconnaître, nous le verrons, que les fonctions du cerveau antérieur du chien ne sont pas les mêmes que celles du cerveau postérieur ou occipital, et que les troubles de la motilité et de la sensibilité générale sont, dans la règle, liés aux lésions destructives des lobes antérieurs, comme les troubles sensoriels le sont à celles des lobes occipitaux » (p. 9). Et,