Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, XXIII.djvu/674

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
664
revue philosophique

La cautérisation par le thermocautère limite très exactement la destruction, mais la réaction inflammatoire est très vive. J’ai conservé, il est vrai, pendant plusieurs mois quelques canards dont le cerveau avait été à la surface détruit par le thermocautère, mais la mortalité a toujours été très forte ; et il vaut mieux procéder autrement.

Avec le scalpel, on n’a presque pas de réaction inflammatoire. Il en est de même quand on emploie la dilacération avec un objet mousse (comme un bout d’allumette par exemple ou une sonde cannelée). On est toujours étonné de voir survivre des oiseaux dont on a, sur une large étendue, dilacéré l’écorce des deux hémisphères. Je préfère l’instrument mousse à l’instrument tranchant ; car alors on n’a pas d’hémorrhagie aussi abondante. En elle-même, l’hémorrhagie n’est jamais assez grave pour déterminer la mort par effusion de sang ; mais c’est parce qu’elle amène un écoulement abondant de sang dans les ventricules cérébraux et dans le quatrième ventricule. Dans ce cas la compression du tissu cérébral et du tissu bulbaire détermine la mort en quelques heures.

Quel que soit le procédé employé, voici ce qu’on observe quand une partie considérable des hémisphères a été détruite.

Je laisse de côté, bien entendu, les cas où les lésions, trop profondes, n’ont pas permis à l’animal de survivre, et je ne prends que les expériences dans lesquelles, malgré l’étendue des lésions, la réparation s’est faite suffisamment pour que l’animal opéré ait pu survivre durant de longs mois à l’opération.

De même je ne tiens pas compte des phénomènes immédiatement consécutifs à l’opération. En effet, soit le traumatisme, soit l’hémorrhagie ont pu déterminer, par excitation ou compression cérébrale, des troubles divers, non imputables à l’absence de telle ou telle portion de substance cérébrale.

Ce qu’il est ici important d’examiner, c’est le trouble que la lésion cérébrale apporte aux fonctions psychiques du canard.

J’ai pensé, à cet effet, qu’il fallait étudier le langage du canard normal, afin d’étudier comment un canard à cerveau lésé se comporterait, comparativement au canard normal.

Il m’a paru qu’on pouvait ramener à six expressions vocales différentes toute la mimique laryngée des canards :

1o Le cri de frayeur ou de douleur : quand on effraye ou qu’on saisit brusquement un canard, il pousse le quoin quoin bien connu ; cri perçant, prolongé, sorte de gémissement strident, facilement reconnaissable ;

2o Le cri d’appel de deux canards séparés l’un de l’autre : ils émettent un cri bref, analogue au premier son, quoin quoin, mais beaucoup plus sec : chaque émission gutturale est isolée, séparée de la suivante par un long intervalle, jusqu’à ce que le canard éloigné ait, lui aussi, répondu de la même manière ;

3° Le cri de reconnaissance : quand les deux canards séparés se sont