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ANALYSES.ch. richet. La chaleur animale.

à cause de son dogmatisme impérieux, auquel répugnait le caractère conciliant et à demi sceptique de Gassendi, à cause de sa théorie étroite, mais claire, qui rejetait les âmes des bêtes, des plantes, des pierres même, et enfin l’âme du monde, toutes choses que Gassendi mêlait trop à son mécanisme, Descartes a remporté le plus de gloire dans cette rude bataille qui eut pour effet de substituer un moment dans la science au règne d’Aristote, non pas Épicure, le moraliste, mais Démocrite, le physicien, et un physicien maintenant passé maître dans les mathématiques.

On pouvait, certes, et même on devait exposer la philosophie de Gassendi en elle-même, sans réfutation ni discussion dogmatique ; et c’est ce que M. T. a su faire avec une élégante brièveté, signalant çà et là plus d’une doctrine qui reparaît de nos jours rajeunie et comme nouvelle, et on ne saurait trop louer ici la forme souvent heureuse dont il revêt un fond solide. Mais ce n’était là peut-être qu’une partie de sa tâche. Puisque son ouvrage est publié dans une « Collection historique des grands philosophes », on a le droit de demander à M. T. qu’il fasse entièrement œuvre d’historien, qu’il démêle les origines de la doctrine qu’il étudie, les emprunts qu’elle a pu faire aux idées contemporaines, les ressemblances ou les différences qu’elle a avec d’autres systèmes, qui l’ont précédée ou suivie, toutes choses qui auraient certainement rendu l’exposition de cette doctrine plus intéressante encore, en lui redonnant quelque peu de la vie qu’elle avait lorsqu’elle vint au jour. M. T. me semble s’être un peu trop renfermé dans l’œuvre de son auteur ; il l’isole trop du milieu qui, sans la produire tout à fait, a dû néanmoins exercer sur elle une certaine influence. On nous promet une autre thèse sur Gassendi, où le philosophe apparaîtra entouré de ce groupe de libres esprits, plus ou moins orthodoxes, qui, pendant la première moitié du xviie siècle, ont tant contribué à l’émancipation de la pensée en France. Cette nouvelle étude sera la bienvenue ici, comme un complément utile et j’oserai dire nécessaire de celle de M. T.

C. A.

Charles Richet. La chaleur animale. Un vol.  in-8o de la Bibliothèque scientifique internationale, avec 47 gravures dans le texte. Paris, F. Alcan, 1889.

Le livre de M. Charles Richet n’est pas un traité complet de la chaleur animale. C’est une série de leçons dans lesquelles sont traités quelques points seulement de cette vaste question ; mais les divers sujets qui ont fixé l’attention de M. Ch. Richet sont précisément, par leur nature même et par le point de vue particulier auquel ils ont été étudiés, de ceux qui intéressent les lecteurs de cette Revue. Il s’agit en effet surtout de l’influence du système nerveux sur la calorification, et, qu’il soit question de la température des mammifères et des oiseaux,