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Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, XXIX.djvu/261

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ROBERTY.l’évolution de la philosophie

cédences nécessaires suivies d’une série constante d’effets ou de conséquences invariables. Cette première analyse et cette classification élémentaire eussent donné à la sociologie moderne une base d’opération solide et un degré d’exactitude qu’elle est loin de posséder. Et ce premier pas accompli, rien n’empêcherait de pousser l’analyse plus loin, de décomposer les évolutions particulières qui forment la série des précédences intellectuelles et la série des séquences sociales, en leurs éléments constitutifs, rangés et classés dans un ordre également sériaire ; on marcherait ainsi de degré en degré, à la conquête de l’inconnu sociologique et à l’établissement des lois fondamentales qui gouvernent les sociétés.

Mais prenons garde de glisser sur la pente des vœux et des desiderata toujours faciles à formuler en théorie, et, laissant de côté la série encore obscure des évolutions sociales, considérons attentivement la série des évolutions intellectuelles dont nous venons d’indiquer les quatre termes primordiaux.

Comment cette série agit-elle sur l’ensemble, qui demeure momentanément indécomposé, de l’évolution sociale ? Ses quatre termes conservent-ils un rang égal, une indépendance absolue, ou bien l’action des uns est strictement subordonnée à celle des autres, et l’évolution d’un de ces termes doit être envisagée, à son tour, comme la vraie cause ou source qui fait surgir et alimente le développement graduel de tous les autres ?

C’est là le problème que Comte s’était implicitement posé, alors qu’il jetait les bases de sa théorie des trois états, et c’est ce problème que nous avons repris à notre tour, pour lui donner une solution différente, résumée par notre loi de corrélation entre les sciences abstraites et la philosophie.

Trompé par les apparences historiques, par le rôle extérieur si important joué par les religions et les conceptions générales dans les événements du monde. Comte, d’un trait de plume, se hâte d’accorder la prépondérance à l’action philosophique. Il décide que l’élément dominant dans l’histoire de l’esprit humain est l’histoire de la philosophie, et que la loi de l’évolution philosophique est la loi la plus générale de l’évolution intellectuelle de l’humanité. Dès lors, tout fut sacrifié et subordonné à l’élément philosophique : la science, forcée d’être tantôt théologique, tantôt métaphysique, et attendant, pour devenir scientifique, l’accomplissement de l’évolution correspondante dans les idées générales, l’avènement de la philosophie positive ; l’art, qui passe par les mêmes phases, qui débute par être l’humble serviteur du dogme théologique, qui s’affranchit à mesure que monte la marée des idées critiques et sceptiques, qui finit par