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A. FOUILLÉE.l’évolutionnisme des idées-forces

comme nous le verrons, il n’y aura plus deux « aspects » d’un Inconnaissable, mais une seule réalité d’expérience offrant diverses formes liées entre elles.

II. — Le principe du monisme immanent et expérimental est le suivant : « Tous les faits de l’univers, sans exception, doivent être engagés dans des liens d’action et de réaction, et former un seul tout dynamique. » Or, à ce point de vue, on ne saurait reléguer le mental « dans les limbes de l’inertie causale ». Le mental, en effet, est tout au moins partie des phénomènes composant l’univers ; si donc il est conditionné, il doit être conditionnant. Il est, comme nous allons le voir, un des éléments de la corrélation universelle entre tous les phénomènes, corrélation que nous appelons influence mutuelle, causalité empirique.

D’abord, au point de vue physiologique et psychologique, on peut poser la loi suivante : Tout état actuel de conscience, en raison de son intensité même, tend à déterminer des mouvements plus ou moins intenses et étendus. En effet, à considérer les choses du côté physiologique, tout processus de conscience implique une excitation du cerveau, et cette excitation, étant elle-même un mouvement plus ou moins faible ou énergique, ne saurait se perdre tout d’un coup ; le mouvement continue donc nécessairement sous une forme ou sous une autre, soit comme mouvement moléculaire de tension, soit comme mouvement visible de translation. Aussi n’y a-t-il pas un seul état de conscience, si faible qu’il soit, qui ne s’accompagne d’une onde de mouvement, et cette onde s’étend plus ou moins, meurt plus ou moins vite, ou au contraire se propage selon que, toutes choses égales d’ailleurs, elle a plus ou moins d’intensité. Cette intensité a son pendant dans l’intensité même de l’état de conscience corrélatif. D’où il suit qu’il est impossible qu’un processus quelconque de conscience, en tant qu’inséparable d’un mouvement cérébral, n’enveloppe pas une certaine force motrice, dont il est comme la révélation interne et la conscience plus ou moins obscure. Par le seul fait d’exister, et d’exister à un degré quelconque d’intensité, faible ou forte, l’état de conscience est l’indice d’un mouvement et la révélation d’une force ayant elle-même un degré d’intensité, petite ou grande.

D’autre part, à considérer les choses du côté mental, un état de conscience est toujours un processus appétitif plus ou moins intense, et il tend à déterminer du mouvement en raison de l’intensité même de la représentation, du sentiment et de l’appétition qu’il enveloppe. Un fort désir, par exemple, tend fortement à produire les mouve-