Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, XXX.djvu/340

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée


REVUE DES PÉRIODIQUES ÉTRANGERS


La Nuova Scienza.

(Luglio-decembre 1889.)

I. La psychogénie pythagorique de M. Paulhan. — Spencer nous a présenté avec une grande érudition l’évolution cosmique comme un phénomène de persistance de la force mécanique, en considérant tous les faits au point de vue de la quantité du mouvement. Ce point de vue étroit doit être complété par celui de la philosophie italique, qui regarde comme essentielle l’évolution de la qualité ou sensation. Ce qui est permanent, c’est l’unité, la forme unitaire numérique : la métamorphose de la qualité qui unifie les mouvements peut s’appeler, avec Pythagore, le nombre réel. M. Paulhan, qui avait déjà remarqué en mainte occasion les lacunes et les défauts de la philosophie de Spencer, se rapproche de la philosophie italique dans son nouveau livre : l’Activité mentale et les éléments de l’esprit. Son idée centrale et directrice est pythagorique, c’est-à-dire la tendance à une plus haute unité de tous les éléments. Les lois secondaires d’inhibition, de contraste, etc., sont ramenées à cette loi primordiale de la systématisation. Ce qui fait la systématisation des éléments psychiques n’est pas la coordination à un but (que la nature inférieure ne connaît pas) : elle se fait sans idée claire, par la simple unité et continuité du nombre réel, c*est-à-dire par la tendance de tous les éléments de la matière à l’unité.

Les sensations n’existent pas en dehors de l’individu sentant : ce sont des manières de saisir l’unité (l’harmonie) ou le manque d’unité (la désharmonie) du multiple. Ces sensations très complexes dérivent des plus simples que nous n’appelons pas sensations, mais dont nous voyons bien les effets dans les cellules, dans les molécules centrales puisantes des cristaux, dans tous les éléments de la matière inorganique. Pour M. Paulhan, la psychogénie procède de la somagénie : la sensation a pour lui la même valeur substantielle que pour le philosophe italique ; elle ne vient pas après et comme superfétation.

Aussi, dans la genèse de la pensée, M. Paulhan abandonne-t-il Spencer et Taine, en ce qu’il étudie le mouvement et la sensation du